L’ancien Président de la République aura décidément beaucoup de mal avec la justice. Beaucoup de rancœurs accumulés depuis qu’il a quitté l’Elysée, beaucoup trop d’ennemis dans le personnel judiciaire pour que les audiences soient menées de façon sereine …
Le chef de l’État a été condamné ce mercredi 17 mai dernier à trois ans de prison dont un an ferme pour corruption et trafic d’influence. Le Parquet réclamait un sursis total. La présidente de la chambre est allée au-delà de ces réquisitions pour condamner le fondateur de l’UMP à de la prison ferme. Par le passé, la magistrate avait eu l'occasion de s'exprimer sur la politique pénale de l'ancien Président.
Dans un entretien donné au journal « Le Monde » en janvier 2009, Sophie Clément se montrait particulièrement virulente face à la proposition de réforme de la justice du gouvernement de Nicolas Sarkozy (membre du conseil de surveillance du groupe Lagardère, propriétaire du JDD). Cette réforme proposait notamment de supprimer la fonction de juge d’instruction, en charge des enquêtes, pour la remplacer par un juge de l’instruction, « qui contrôlera le déroulement des enquêtes mais ne les dirigera plus », selon les termes employés alors par le président.
Sophie Clément vent debout contre la réforme
Juge d’instruction au Pôle financier au moment de la réforme, Sophie Clément est alors vent debout contre le projet. Elle accuse le gouvernement de l’époque de vouloir « museler les juges », dénonçant un « fantasme d’homme politique ». La réforme de Nicolas Sarkozy proposait de rattacher le juge de l’instruction au Parquet, lui-même subordonné hiérarchiquement au ministère de la Justice. La magistrate y voyait une atteinte à la séparation des pouvoirs et un risque d’interférence de l’exécutif dans le déroulement des enquêtes.
« Avec le système préconisé par Nicolas Sarkozy, l’affaire du sang contaminé n’aurait pas existé, l’affaire Elf non plus », mettait en garde Sophie Clément. Pour elle, « il faudrait que le parquet soit masochiste et schizophrène pour lancer des poursuites qui pourraient nuire à la raison d’État », au risque pour les magistrats réfractaires « de se suicider professionnellement ». Selon Sophie Clément, un juge de l’instruction soumis au Parquet qui risquerait de gêner le gouvernement par une enquête « ira demander l’avis de son chef, qui n’est autre que le ministre de la Justice ». « Comment voulez-vous que les procureurs se battent sur des dossiers sensibles, à moins de vouloir être exilés dans un tribunal de second ordre ? », déplorait-elle.
La magistrate menaçait même de changer de poste en cas d’adoption de la réforme, refusant d’être subordonnée au gouvernement. « Si la réforme voit le jour, je changerai de poste, pour en choisir un où je peux encore me lever et applaudir quand on parle d’indépendance de la justice », assurait-elle.
La fonction de juge d’instruction sera finalement maintenue par le gouvernement, qui reculera devant la levée de boucliers de la magistrature. Sophie Clément, qui se définit comme « indépendante », reconnaissait néanmoins en 2009 que « le juge peut être excessif, se tromper ».
Source : leJDD.fr 17-05-2023
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