Alors que l'Etat s'est engagé à vendre pour 4 milliards d'euros de certaines participations dans des entreprises, le ministère des Finances vient d'annoncer avoir acheté 9,56 millions de titres de Renault. L'Etat se réserve la possibilité d'acheter 4,44 millions de titres supplémentaires pour une somme comprise «entre 814 millions d'euros et 1,23 milliard d'euros», précise le ministère. Sa participation à la suite de cette opération va augmenter jusqu'à 19,74% du capital de Renault contre 15,01% auparavant.
Pourquoi cet intérêt soudain pour le constructeur automobile ? L'enjeu est-il industriel, pour influencer le constructeur à développer de nouvelles technologies ? La réponse se trouve plutôt sur fond de guerre avec certains actionnaires alors que l'assemblée générale doit se tenir le 30 avril.
Une résolution déposée vise à empêcher l'acquisition de droits de vote doubles par les actionnaires détenant des titres depuis plus de deux ans. Cette disposition, issue de la loi Florange, prévoit «que, sauf décision contraire des assemblées générales, les actionnaires qui conservent leurs titres pendant au moins deux ans sont récompensés par l'octroi de droits de vote doubles : au bout de deux ans, chaque action qu'ils détiennent leur donne deux voix lors des assemblées générales.»
Ces droits de vote doubles sont déjà en place dans 22 entreprises du CAC 40, comme EDF, GDF Suez ou Orange. L'objectif est de favoriser les actionnaires «fidèles» ou les salariés actionnaires... Problème : certains fonds spéculatifs voient cela d'un mauvais œil et cherchent dans les assemblées générales à rassembler une majorité des deux tiers pour casser ce dispositif et revenir au bon vieux principe "une action, une voix".
Ainsi, en montant dans le capital du constructeur automobile, l'Etat leur coupe directement l'herbe sous le pied et cette résolution n'a, a priori, aucune chance de passer. Au terme de ses achats, l'Etat va contrôler 23,2% des droits de vote exerçables.
Une fois l'assemblée générale passée, l'Etat, qui a récemment rappelé qu'il n'avait pas vocation à avoir plus de 15% du capital de Renault, s'est ménagé une solution qu'il pourra ou non exercer pendant six mois. Pendant cette période, l'Etat pourra revendre «à prix fixe» ces 14 millions de titres, c'est à dire au prix d'achat et sans tenir compte des éventuelles fluctuations boursières.