"On est dans une logique de prévention (...) Il n'y a pas d'opposition à avoir", estime le Planning familial. Et d'ajouter, en réponse aux attaques du gouvernement: "Personne ne marche sur nos plates-bandes !" Christine Boutin dénonce un projet "scandaleux", tandis qu'à l'inverse, Marylise Lebranchu appelle les régions socialistes à généraliser le dispositif.
Le Planning familial a apporté son soutien, vendredi 13 novembre, au dispositif de chèques contraception mis en place par Ségolène Royal dans les lycées de la région Poitou-Charentes. Ce dispositif s'inscrit dans une "logique de prévention" qui permettra un meilleur maillage du territoire, estime Marie-Pierre Martinet, secrétaire générale du Mouvement français pour le planning familial.
"C'est une bonne chose de donner aux mineures un meilleur accès à l'information" en matière de contraception, explique Marie-Pierre Martinet dans une interview au Monde. "On est dans une logique de prévention pour que les jeunes soient acteurs de leur propre vie. Il n'y a pas d'opposition à avoir. Personne ne marche sur nos plates-bandes !"
"Je le mets au défi d'interdire"
C'était pourtant l'argument du gouvernement pour s'opposer au dispositif. "L'Education n'a pas à se substituer au planning familial, seul autorisé à prescrire des contraceptifs à un enfant mineur", a estimé le ministre de l'Education nationale, Luc Chatel.
"Je le mets au défi d'interdire", a lancé l'ex-ministre socialiste déléguée à l'Enseignement scolaire (1997-2000), puis à la Famille (2000-2002), en rappelant que chaque année en France, 10.000 grossesses sont détectées chez des jeunes filles de moins de 17 ans. "Cette action est préparée depuis trois ans et a l'accord de tous les partenaires", a assuré Ségolène Royal.
Nadine Morano, secrétaire d'Etat à la Famille a estimé pour sa part que l'action de Ségolène Royal consistait à "recycle(r) ce qui existe déjà". Quant à Christine Boutin, présidente du Parti chrétien-démocrate, elle a dénoncé un projet qu'elle juge "scandaleux".
Vers une généralisation ?
Marylise Lebranchu, députée PS du Finistère et proche de Martine Aubry, estime pour sa part que "la polémique n'a pas lieu d'être car il s'agit d'une politique de santé publique et de prévention qui devrait être portée par l'Etat plutôt que par une Région. Cette mesure est juste et mérite sa généralisation". La vice-présidente du Conseil régional de Bretagne "appelle l'ensemble des présidents de région à généraliser cette proposition en l'attente du refus de l'Etat".
Le "pass contraception", gratuit, se présente comme un carnet de chèques restaurant, avec des tickets pour une visite chez un médecin et chez un gynécologue ainsi qu'un bon d'échange en pharmacie pour un moyen contraceptif, le tout pour une valeur totale de 144 euros. L'opération va coûter 400.000 euros à la région Poitou-Charentes.
Symboliquement, Ségolène Royal a tenu à porter elle-même vendredi le premier colis au lycée professionnel Le Dolmen de Poitiers.
Au total, 1.400 colis comprenant un "pass contraception" et des préservatifs seront expédiés dès lundi par la poste à 90 lycées dotés d'infirmières scolaires.
"Un outil supplémentaire pour lutter contre les grossesses précoces"
Pour Tiffany et Dina, deux lycéennes de 17 ans, "cela va aider les jeunes; ça sera plus facile car l'infirmière, on la connaît plus que le médecin".
Marina, leur camarade de 18 ans, s'étonne un peu car, dit-elle, "le planning familial existe à l'école et tout est pris en charge".
Isabelle Duponteil, infirmière scolaire au lycée Kyoto de Poitiers, voit quant à elle le "pass" comme "un outil supplémentaire pour lutter contre les grossesses précoces et non désirées".
Pour cette responsable syndicale au SNICS-FSU, qui reçoit régulièrement des "jeunes filles en détresse", "il n'est pas question d'encourager la contraception, ni de se substituer au rôle parental, mais de répondre à des situations ponctuelles".
"Il vaut mieux de la prévention qu'un avortement qui occasionne d'énormes dégâts pour l'adolescente et sa famille", renchérit Isabelle Siroy, porte-parole départementale de la FCPE, première fédération de parents d'élèves.
Pour la Peep en revanche (2e fédération française), l'Education nationale "ne doit pas se substituer aux parents".
Reste à savoir ce que feront les infirmières scolaires de cet outil qui "n'a pas l'aval de la hiérarchie", note Isabelle Duponteil.
"Ces chèques ne pourront être distribués dans les établissements scolaires sans mon accord", a en effet prévenu Béatrice Cormier, recteur de l'académie de Poitiers. "L'idée est bonne, mais n'y a-t-il pas un autre endroit que les lycées" pour lancer cette idée, s'est interrogé le recteur.
Source : Nouvelobs.com avec AFP 14-11-2009