"Sinistrée", "en état d'urgence absolue" : le garde des Sceaux, Jean-Jacques Urvoas, décrit dans un entretien au JDD ce dimanche 3 avril une justice "à bout de souffle", avec un ministère qui "n'a plus les moyens de payer ses factures". Un diagnostic qui tranche avec celui dressé par Christiane Taubira lors de son départ précipité de la Chancellerie. Mais de cela Jean-Jacques Urvoas ne dira pas un mot !..
Une justice "sinistrée"
Dans son entretien au JDD, le ministre, en poste depuis deux mois, rappelle avoir dit à son arrivée que "la justice était au bord de l'embolie". "Depuis que je pousse la porte des juridictions, je dis plutôt qu'elle est sinistrée...", s'alarme-t-il. Par exemple, "la direction de l'administration pénitentiaire a 36 millions d'euros de factures impayées pour des hospitalisations de détenus". Ou encore, "l'État a une dette de 170 millions d'euros" de frais d'interprètes, de laboratoires d'analyses ADN, d'experts, d'écoutes téléphoniques... "Tous ces prestataires privés sont payés au minimum avec quatre mois de retard", déplore le ministre.
Jean-Jacques Urvoas assure qu'"énormément d'efforts" ont été faits depuis 2012 "sur les créations de postes", de magistrats notamment. Mais, dit-il, "les budgets de fonctionnement n'ont pas suivi". Ainsi, poursuit le ministre, "je connais même un tribunal où on n'imprime plus les jugements, parce qu'il n'y a plus d'argent pour les ramettes de papier".
La réforme du Conseil supérieur de la magistrature
Dans cet entretien au JDD, le ministre rappelle par ailleurs sa volonté de mener à bien le projet de réforme constitutionnelle sur le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), destiné à renforcer l'indépendance des magistrats. "Cette réforme consiste à faire nommer les procureurs par le CSM, autrement dit à enlever au politique ce pouvoir de nomination", explique-t-il. "Voir poindre à nouveau aujourd'hui des tentations de nominations politiques de procureurs me fait dire que cette réforme du CSM, qu'appellent de leurs vœux tous les magistrats, est absolument nécessaire", déclare le ministre.
L'arrivée de Salah Abdeslam en France
Le ministre évoque enfin le transfèrement de Salah Abdeslam, qui a donné son accord pour être extradé depuis la Belgique. Celui-ci devrait intervenir au cours de la semaine prochaine. "Pour ce qui relève de ma responsabilité, le jour où un juge décidera son incarcération, nous prendrons toutes les mesures nécessaires", déclare Jean-Jacques Urvoas au JDD. "Il sera probablement à l’isolement sous surveillance constante, tout simplement parce qu’il faut qu’il puisse aller au procès."
Source : leJDD.fr 03-04-2016