Surprenante polémique entre administrations sur les chiffres du chômage, en baisse en janvier. Les services du ministère du Travail estiment que le niveau des radiations pour défaut d'actualisation des demandeurs d'emploi est "inhabituellement fort", ce qui prête les données à caution. Mais Pôle emploi a démenti tout "dysfonctionnement" dans le processus de collecte des informations. Pour la ministre du Travail Myriam El Khomri, il n'y a pas de "bug".  La statistique de janvier sera-t-elle révisée?

Les polémiques sur les chiffres du chômage sont fréquentes, mais celle-ci est une première. La publication mensuelle des inscrits à Pôle emploi a donné lieu à un pataquès surprenant entre deux administrations de l’Etat, avec la ministre Myriam El Khomri au milieu. A 18 heures, ce mercredi, la Dares, le service statistique du ministère du Travail, publie comme prévu les données portant sur le mois de janvier 2016. Bonne nouvelle pour le gouvernement, le nombre de demandeurs d’emploi en catégorie A recule de 27.900, c’est la plus forte baisse du quinquennat. La ministre du Travail, informée de longues heures auparavant, diffuse son propre communiqué qui souligne, sans surprise, ce recul du chômage.

"Un rebond inhabituellement fort" des radiations

Seulement voilà, la Dares a revu ses chiffres au dernier moment. Elle estime que le nombre de radiations pour défaut d’actualisation (les chômeurs qui ne remplissent pas leur déclaration mensuelle) enregistre "un rebond inhabituellement fort" pour les catégories A, B et C. La hausse est de 1,5% sur trois mois, concernant 216.900 personnes, toujours sur trois mois. Ce niveau est certes historiquement élevé. La Dares ne donne toutefois aucun détail mensuel. Elle prend ainsi une demi-heure supplémentaire pour publier ses données et parle d'une hausse "inexpliquée". Les statisticiens complètent leur document avec un avertissement faisant état de leurs doutes sans livrer aucune piste, et appellent à interpréter les résultats "en tendance", c'est-à-dire sur une période plus longue.

D’ordinaire, les interrogations des services statistiques, quand elles existent, font pourtant l’objet d’une mention explicative. Le cabinet de Myriam El Khomri le découvre au dernier moment sans davantage de décryptage.

Il n’y a eu "aucun bug", clame El Khomri

A la lecture de cette mention, c’est la stupeur. La baisse de janvier est communiquée, mais elle est remise en cause. La polémique sur les radiations enflamme les réseaux sociaux. Ce n’est pas la première fois que les radiations pour défaut d’actualisation posent problème. En août 2013, l’affaire du bug SFR avait provoqué une diminution du baromètre officiel de 50.000 personnes. L’opérateur, sous-traitant de Pôle emploi, n’avait pas relancé tous les chômeurs. Parmi eux, 18.000, en réalité, auraient dû figurer dans les chiffres du chômage…

Or, cette fois-ci, il n’y a eu "aucun bug", clame la ministre Myriam El Khomri, qui parle de chiffres "honnêtes et corrects".

De son côté, Pôle emploi publie un communiqué en début de soirée pour démentir tout "dysfonctionnement dans le processus d’actualisation des demandeurs d’emploi".

Le ministère du Travail, désagréablement étonné, a demandé des explications à la Dares. La hausse des radiations de janvier peut avoir de nombreuses origines : des reprises d’emploi non déclarées, des oublis des demandeurs d’emploi, etc. Une investigation supplémentaire semble devoir s’imposer. Le chiffre de janvier risque donc d’être révisé dans un mois.

Une certitude cette fois c’est que les chiffres mensuels du chômage vont rendre nerveux bon nombre d’administrations après les déclarations de François Hollande. Car la baisse « durable » du nombre de chômeurs devrait intervenir maintenant très rapidement !...

Source : LeJDD.fr  26-02-2016