Apple, l'entreprise la plus riche du monde a levé 12 milliards de dollars sur le marché obligataire afin de racheter ses propres actions et d'en soutenir le cours, fragilisé par l'absence de nouveaux produits.
On ne prête qu'aux riches... Appliquant le proverbe à la lettre, Apple, dont les réserves de cash atteignent 150 milliards de dollars, vient de lever 12 milliards de dollars sur le marché obligataire. Autrement dit, la première capitalisation mondiale - qui vaut plus de 500 milliards de dollars en bourse - a préféré s'endetter plutôt que de puiser dans son "trésor de guerre". Un paradoxe? Sans aucun doute. Et qui s'explique surtout par de mauvaises raisons...
« Rendre de la valeur aux actionnaires »
L'opération a en fait été annoncée la semaine dernière dans la foulée de résultats qui confirment, certes, la très bonne santé financière de l'entreprise, mais se révèlent sans surprise. Afin de soutenir l'enthousiasme d'actionnaires blasés, le groupe de Cupertino a donc décidé d'augmenter le dividende trimestriel - autrement dit, la rémunération de base de l'actionnaire - et de porter de 60 à 90 milliards d'euros un programme de rachat d'actions, qui est une façon plus exceptionnelle de "rendre de la valeur aux actionnaires". Directement et indirectement, puisqu'acheter des actions permet de soutenir le cours tout en réduisant le nombre de titres sur le marché. L'amplification des rachats d'actions mis en œuvre l'année dernière ne peut donc que satisfaire les investisseurs les plus critiques. C'est notamment le cas du milliardaire Carl Icahn, qui reprochait depuis longtemps au fabricant de l'iPhone d'accumuler les profits mais de ne rien en faire.
Emprunter plutôt que de payer des impôts
Sur le fond, certains se demandent toutefois s'il n'y a pas une façon plus utile de consacrer ses profits qu'à ce type d'opération purement financière. Mais celle-ci interpelle également sur un plan purement technique. Car Apple ne fait pas directement appel à ses immenses réserves de liquidités pour la financer. Comme une vulgaire entreprise lambda, il emprunte l'argent. Pas à une banque, mais sur les marchés. Evidemment, vu son profil, il peut procéder à des mega-emprunts à la hauteur de ses mega-rachats d'actions. Sur la dernière tranche de rachat de titres de 14 milliards de dollars, 12 milliards ont ainsi été financés par l'émission d'obligations. Le groupe avait emprunté de la même façon 17 milliards de dollars l'année dernière.
La raison de ce paradoxe n'a rien de secret. En bon adepte de l'optimisation fiscale, Apple fait en effet aboutir une bonne partie de ses profits à l'étranger. Quelque 130 milliards de dollars sur un total de 150 milliards de réserves de cash sont ainsi détenus en dehors des Etats-Unis. Non qu'elles soient inaccessibles mais les rapatrier conduirait à une taxation à hauteur de 35%. Apple préfère donc emprunter que donner plus du tiers de sa fortune à l'Oncle Sam. Et ce d'autant plus qu'il peut le faire à un taux très intéressant, les investisseurs se précipitant pour prêter de l'argent à une telle machine à cash (il paye à peine 77 points de base d'intérêts de plus que l'Etat américain, pour des obligations à 10 ans, précise les Echos).
« Le Financial Times » évoque toutefois le risque de saturation du marché obligataire américain si ces opérations jumbos se multipliaient, car Apple n'est pas le seul à y avoir recours. Verizon a ainsi levé 49 milliards de dollars en septembre pour financer le rachat de la participation de Vodafone dans leur filiale commune. Ce qui va "obliger" la fime de Cupertino à aller chercher de l'argent sur les marchés européens, afin de trouver de meilleurs taux d'intérêt, explique le quotidien britannique des affaires. Un inconvénient en somme assez minime...
En attendant, Apple va peut-être continuer de faire pression sur l'administration Obama pour obtenir une amnistie fiscale qui lui permettrait de rapatrier son pactole étranger à moindre coût. Mais tous les groupes américains n'ont pas sa patience... ou son manque de civisme. eBay a ainsi publié mercredi une perte de 2,3 milliards de dollars au premier trimestre après avoir passé une lourde provision destinée à "faciliter le rapatriement d'environ 6 milliards de dollars nets de bénéfices étrangers". Le lancement d'une nouvelle mode fiscale aux Etats-Unis...?
Source :L’Express.fr 04-05-2014
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