Si l’on comprend bien les réflexions de la Ministre, et ses interventions ont été suffisamment nombreuses pour que l’on ait compris ( ?), la réforme engagée fait suite à un certains nombres de constats :
1/ Les élèves s’ennuient au collège. Il faut les faire sortir de la banalité, faire plus ludique !...Le problème selon la ministre, c’est « la passivité au collège »
2/ Il faut donner les mêmes possibilités à tous les élèves.
D’où la réforme du collège entamée par Najat Vallaud-Belkacem qui tend à solutionner ces deux problèmes mais qui créé la polémique.
L'interdisciplinarité
Huit "enseignements pratiques interdisciplinaires" (EPI), à la croisée de plusieurs matières, doivent être mis en place : "Développement durable" ; "Information, Communication, Citoyenneté" ; "Monde économique et professionnel" ; "Culture et Création artistiques"… Afin de laisser la place à trois heures de cours d'EPI par semaine entre la 5e et la 3e (six EPI à choisir au total), le français, les maths ou la géographie devront un peu se serrer dans les emplois du temps.
Peu enclins au travail collectif, quelques enseignants goûtent modérément ce mélange des genres, d'autant moins s'il vient amputer le quota horaire de leur discipline. Bonne idée ou pas, l'un des objectifs des EPI est pourtant, en décloisonnant les matières, d'aider les élèves en difficulté en les faisant sortir de l'ornière scolaire.
Les critiques sont nombreuses : les professeurs n’ont pas de « crédit d’heures » pour préparer ensemble, on rogne encore les matières fondamentales Français et mathématiques, l’aspect plus ludique des EPI suffira-t-il a conforter le socle des connaissances indispensables à acquérir au collège ? Probablement non.
La suppression des options latin et grec
Supprimés comme options à part entière, le latin (deux heures hebdomadaires en 5e, trois heures en 4e et 3e) et le grec (trois heures en 3e) sont "remplacés", dans le cadre de l'interdisciplinarité, par un EPI "Langues et Cultures de l'Antiquité". Un "enseignement de complément" (une heure par semaine en 5e, deux heures en 4e et 3e) pour les langues anciennes sera aussi proposé.
Cet abandon du latin ou du grec est le signe, pour ses détracteurs, d'un nouveau recul de l'excellence au profit d'un nivellement par le bas. Aux yeux des défenseurs des humanités, le nouvel EPI "Langues et Cultures de l'Antiquité" n'est qu'un cautère sur une jambe de bois, un vulgaire vernis de culture. De plus, la dotation horaire pour "l'enseignement de complément" ne semble pas garantie.
Les pro-réforme, eux, soulignent qu'aujourd'hui moins de 20 % des collégiens choisissent le latin en 5e, 5 % le poursuivant au lycée. Et que latin ou grec sont souvent pris avec pour seul objectif d'être dans une bonne classe, voire de contourner la carte scolaire.
C’est surtout ce dernier point qui chiffonne la ministre. Elle prétend, non sans une certaine mauvaise foi, qu’il vaut mieux dispenser le latin et le grec à l’ensemble des élèves (via l’EPI) plutôt que de les réserver à quelques uns.
La suppression des classes bilangues
Les sections bilangues, qui permettent l'apprentissage de deux langues étrangères dès la 6e et concernent actuellement 15 % des élèves, sont supprimées (mais maintenues pour les enfants initiés en primaire à une autre langue que l'anglais). En revanche, tous les élèves étudieront une deuxième langue vivante (LV2) dès la classe de 5e (deux heures trente par semaine), et non plus à partir de la 4e, comme actuellement.
Aux premières loges, les enseignants d'allemand craignent que la langue de Goethe, dont la chute de l'enseignement avait été enrayée par la relance de ces sections bilangues, soit la grande perdante de cet abandon. L'ambassadrice d'Allemagne en France s'est d'ailleurs émue auprès de Najat Vallaud-Belkacem de la baisse du nombre d'élèves étudiant l'allemand que cette réforme entraînerait.
Ses partisans estiment, eux, que l'apprentissage par l'ensemble des collégiens de deux langues étrangères dès la 5e permettra de relever le niveau en langues des élèves français, très mal notés dans les classements internationaux. Ils remarquent par ailleurs que les classes bilangues, souvent considérées comme élitistes, permettaient aux collèges de faire des "classes de niveau".
Là encore, comme pour le latin, il s’agit pour la ministre de supprimer ces classes élitistes. Dire que l’on va ainsi relever le niveau en langue des collégiens est une stupidité. Il faudrait d’abord leur apprendre à pratiquer leur propre langue correctement, puis leur apprendre à parler une langue étrangère correctement. La deuxième langue au collège est un gâchis d’heures qui ne sert strictement à rien.