Laurent Gbagbo répétait à qui voulait bien l’entendre que les élections étaient pour lui une formalité et qu’il était assuré de la victoire. L’affaire se complique un peu car non seulement il n’a pas gagné au premier tour comme il le pansait, mais le deuxième tour fixé au 21 novembre s’avère compliqué pour lui.  Arrivé en troisième position du premier tour, Henri Konan Bédié (photo) fera office d'arbitre pour le second tour de l'élection présidentielle ivoirienne. Estampillé "faiseur de roi",l'ancien président du pays a fait son choix: dimanche 7 novembre dernier, il a appelé ses électeurs à voter pour Alassane Ouattara, au détriment du sortant, Laurent Gbagbo.

Il s'agit sans doute d'un tournant dans l'élection présidentielle ivoirienne. Dimanche 7 novembre, Henri Konan Bédié a appelé ses partisans à donner leur suffrage à Alassane Ouattara, qui, sous la bannière du Rassemblement des républicains (RDR), affrontera le sortant, Laurent Gbagbo, le 21 novembre prochain, lors du duel final pour la présidence du pays. "Le RHDP (Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix) appelle les militants, sympathisants et tous les électeurs à se rassembler autour de cette candidature (…) afin d'assurer au RHDP une victoire éclatante",indique un communiqué publié par les services de l'ancien chef de l'Etat ivoirien.

Cette prise de position pourrait s'avérer capitale: le 31 octobre dernier, Henri Konan Bédié, dit "HKB", était arrivé en troisième position du scrutin, avec 25% des suffrages. Si ceux-ci s'ajoutent aux 32% conquis par Alassane Ouattara, ce dernier, mathématiquement, ravirait la présidence du pays à Laurent Gbagbo, en poste depuis 2000 et arrivé en tête du premier tour, avec 38% des votes.

Le voisin sénégalais fait monter la pression

Toutefois, la logique arithmétique n'est pas le seul paramètre à prendre en compte en Côte d'Ivoire. Loin de là. L'accord - conclu avant le premier tour et désormais officialisé - entre Bédié et Ouattara n'est tourné que vers un seul objectif: battre Gbagbo. Pour le reste, entre les deux hommes, le contentieux est lourd. "HKB", renversé en 1999 par un coup d'Etat, est en effet suspecté d'être à l'origine du dangereux concept d'"ivoirité",selon lequel un citoyen serait ivoirien seulement si ses quatre grands-parents sont nés en Côte d'Ivoire.

Un artifice administratif qui avait conduit à écarter Alassane Ouattara, d'origine burkinabaise, de l'élection présidentielle de 2000 et qui avait surtout provoqué des troubles faisant des centaines de victimes à travers le pays. Dix ans plus tard, nombreux sont les partisans de Bédié - essentiellement localisés en pays Baoulé dans le centre de la Côte d'Ivoire - qui pourraient refuser d'accorder leur suffrage à Ouattara, musulman de religion et figure marquante du nord du pays, en rébellion contre le pouvoir central entre 2002 et 2007.

A l'heure actuelle, il est donc impossible de quantifier la portée de ce report des voix espéré par l'opposition. Toutefois, si, en public, Gbagbo bombe le torse, l'hypothèse d'une défaite semble prise au sérieux dans le camp présidentiel. Exemple flagrant d'une certaine fébrilité: au lendemain du premier tour, bien avant que Bédié ne se prononce, Abdoulaye Wade, le président sénégalais, était allé à la rencontre d'Alassane Ouattara pour lui apporter son soutien. Un geste jugé inamical par Laurent Gbagbo, qui avait immédiatement rappelé l'ambassadeur ivoirien de Dakar.

Source : lejdd.fr  08-11-2010 

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