Malgré la large avance des indépendantistes catalans, Madrid ne reconnaît pas la victoire de Junts pel Si et insiste sur le fait que les séparatistes n'ont pas obtenu la majorité des voix.
Au lendemain de la victoire des indépendantistes aux élections catalanes, deux chiffres sont à analyser. Tout d'abord la majorité absolue : en obtenant 72 des 135 sièges du Parlement catalan les partis séparatistes, Junts pel Si (Ensemble pour le Oui, une coalition de gauche et de droite) et CUP (Candidature d'union populaire, gauche radicale), ont imposé leur calendrier. Artur Mas, le président sortant de la Généralité de Catalogne avait promis la mise en place d'"une feuille de route" de 18 mois : 10 mois pour rédiger une Constitution, et 8 mois pour que le parlement catalan déclare l'indépendance de façon unilatérale. Junts pel Si et CUP ont obtenu assez de sièges pour mettre en place ce plan. Grâce à leur majorité absolue au Parlement, les séparatistes pourront mettre en exécution leur plan.
Majorité en sièges mais pas en voix
Madrid oppose à cette majorité absolue, la majorité des voix. Les deux partis indépendantistes ont obtenu 48,6% des suffrages. Les unionistes (le PP, le PS, Ciudadanos) revendiquent donc la victoire du non à l'indépendance. Mais ils englobent dans leurs calculs le résultat obtenu par la coalition CAT Si que es Pot (La Catalogne, Oui c'est possible, coalition comprenant Podemos). Or, ce parti qui prône la stratégie du ni-ni, ni pour l'indépendance, ni pour le statu quo, près de 9% des voix. Difficile donc de savoir quel est la proportion exacte des pro et anti indépendance.
La Catalogne, quatrième économie de la zone euro
La participation exceptionnelle a atteint 77 %, dépassant de 10 points celle du dernier scrutin régional en 2012, un record pour ce genre de vote dans la région. Artur Mas s'est donc targué d'être parvenu à transformer ce scrutin en plébiscite. Quel que soit l'interprétation du résultat, ce scrutin fait entrer l'Espagne dans une zone de fortes turbulences, à trois mois des élections législatives. D'autant que le gouvernement a prévenu qu'il agirait contre tout acte "illégal" du gouvernement régional. Mais ce résultat est un nouveau revers pour Mariano Rajoy. Le chef du gouvernement conservateur s'était impliqué personnellement dans la campagne, plaidant pour une "Espagne unie", et avertissant les Catalans qu'en cas d'indépendance unilatérale, ils risquaient l'exclusion de l'Union européenne, une explosion du chômage, et l'effondrement des retraites. Malgré ses efforts, son Parti Populaire a perdu huit sièges, tombant de 19 à 11.
Si la Catalogne s'en allait, elle emporterait avec elle un cinquième du PIB de l'Espagne, quatrième économie de la zone euro, et un quart de ses exportations. L'éventualité a inquiété banquiers et entrepreneurs, qui ont invité Madrid et Barcelone à reprendre le dialogue.
Source : leJDD.fr 28-09-2015