En cas de victoire, la candidate du Front National, qui a fait du slogan «achetons français» sa marque de fabrique, a promis de rétablir des barrières douanières, en imposant une taxe de 3% sur certaines importations. Mais elle n’a jamais fait la démonstration de l’efficacité de la mesure.
Un «protectionnisme intelligent».
C'est avec cette idée que la candidate du FN, Marine Le Pen, souhaite soutenir les entreprises françaises face à la concurrence internationale déloyale. Pour y parvenir, l'élue frontiste martèle depuis plusieurs mois son intention d'imposer une taxation à hauteur de 3% sur les produits et services importés de certains pays et une autre taxe, cette fois-ci à 35%, pour tous les produits qui viennent d'entreprises ayant quitté le sol français. Deux mesures qu'elle érige comme un rempart contre la délocalisation, à l'heure ou l'industriel Whirlpool va délocaliser sa production de sèche-linge en Pologne. Mais ces deux propositions pourraient s'avérer particulièrement dangereuses pour le pouvoir d'achat des consommateurs français.
Impossible dans le cadre de L’Union Européenne
En premier lieu, dans l'état actuel des traités signés entre la France avec les autres Etats, appliquer les deux taxes serait tout simplement impossible. Et ce pour une bonne raison : le traité de Rome, texte fondateur de l'Union européenne, engage les Etats membres à éliminer entre eux «droits de douane et restrictions quantitatives à l'entrée et à la sortie des marchandises». Mais la candidate pourrait s'affranchir de cette première difficulté puisqu'elle envisage de quitter l'UE. Viendrait alors une autre barrière, et pas des moindres, celle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
Si elle quitte l'Union Européenne, la France reste, en effet, tout de même soumise aux règles de l'OMC, dont la position est d'encourager ses membres à diminuer les droits de douane. Il faudra donc que la France renégocie, un à un, l'ensemble de ses droits de douane et le pays pourrait craindre diverses sanctions. «Avec l'OMC, on ne peut pas mettre en place des taxes comme on le souhaite», explique au Figaro Christopher Dembik, responsable de la macroéconomie chez Saxo Bank.
Des mesures punitives
«Le problème des droits de douane, et on l'a largement constaté dans l'histoire, plus on les augmente, plus l'impact sur les revenus les plus bas sera fort. Quoi qu'elle en dise, si Marine Le Pen met en place cette taxation, ce ne sera pas l'importateur ou l'industriel qui va rogner ses marges mais c'est bien le consommateur qui va payer plus. Et si les pays ciblés produisent des biens de consommation courante, ce sera grosso-modo un ajout de 3% de TVA», précise l'économiste. A cela Marine Le Pen répond: «3 % sur l'importation, c'est totalement indolore». En effet, les grandeurs économiques comme le PIB, ne ressentirons que très peu l'effet immédiat de cette taxation. En revanche les mesures de rétorsion contre la France, qui suivront, auront un impact bien plus conséquent…
En contrepartie de cette taxation à 3%, les Etats du monde entier pourraient, en effet, instaurer des mesures économiques punitives. Si on prend l'exemple de la Chine - pays qui a de forte chance d'être ciblé par Marine Le Pen - les sanctions pourraient s'avérer dangereuses pour la compétitivité des entreprises françaises. «La Chine aura des moyens de pression commerciale bien plus importants que la France. C'est-à-dire que le pays pourra limiter les investissements qu'il fait en France, limiter la capacité des entreprises françaises à investir dans son pays, et en dernier recours faire appel à l'organisme des différends de l'OMC qui est un processus long mais contraignant pour le pays condamné», détaille Christopher Dembik.
«Madame Le Pen nie la division du travail et son coût»
Ne s'arrêtant pas à cela, la candidate du Front national souhaite ajouter une taxe de 35% pour tous les produits des entreprises qui ont délocalisé leurs usines. Pour les raisons évoquées précédemment - que ce soit la réglementation du l'Union Européenne ou celle de l'OMC - Marine Le Pen aura les mêmes difficultés à instaurer cette mesure. Toutefois, si elle y arrivait les conséquences pour le consommateur seraient bien plus directes.
«Prenons un exemple simple: celui de la production d'une voiture Renault en Roumanie. Vous lui imposez une taxe de 35% sur ses importations. L'entreprise va alors réfléchir entre revenir produire en France, et par conséquent augmenter nettement ces coûts de production - et donc de façon mécanique le prix du bien pour le consommateur -, ou finalement rester en Roumanie et viser de nouveaux marchés. Imaginons que l'entreprise revienne sur le sol français, où le coût du travail est bien plus important, le prix de la voiture va donc nettement augmenter. Une nouvelle fois, c'est le consommateur qui perd et qui va devoir payer plus» souligne Christopher Dembik avant de conclure: «Madame Le Pen vit dans un monde idéal ou elle nie la division du travail et son coût».
Source : LeFigaro.fr 29-04-2017
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