C’est vraiment curieux de voir comme les yeux des ministres « virés » du Gouvernement s’ouvrent comme par miracle quelques jours à peine après leur éviction. La dernière en date est Marylise Lebranchu qui s’épanche dans une interview à Mediapart. Elle estime que François Hollande "a changé par rapport à la ligne dite du 'Bourget'" et assure également s'être posé la question de quitter le gouvernement lorsque Christiane Taubira est partie fin janvier. Elle s’est posé des questions mais elle serait tout de même bien restée, même aux cotés d’un Président qui a changé !..
Congédiée lors du dernier remaniement, Marylise Lebranchu a - comme elle l'avait indiqué lors de sa sortie - retrouvé sa liberté de parole. L'ancienne ministre de la Fonction publique observe qu'à l'arrivée de Manuel Valls à Matignon en avril 2014, "l'équilibre devait se faire entre Manuel (Valls) et François Hollande, et le discours du Bourget [le 22 janvier 2012, NDLR]". "Aujourd'hui, il ne se fait plus", regrette-t-elle dans une interview à Mediapart, évoquant un manque de "ligne politique claire".
"Manuel Valls est Manuel Valls depuis le premier jour de sa nomination. Et depuis la primaire de 2011. S’il y a bien une chose que je ne lui reproche pas, c’est d’être très structuré politiquement. Il a un corpus idéologique défini. On sait où il va", estime Marylise Lebranchu. Elle est plus critique vis-à-vis de François Hollande, qui a "changé par rapport par rapport à la ligne dite 'du Bourget'". L'ancienne ministre, redevenue députée, affirme également ne pas avoir "compris les conditions du départ de Jean-Marc Ayrault, avec un accord entre Manuel Valls, Benoît Hamon et Arnaud Montebourg, qui n’a pas été conçu avec une ligne politique claire". En résumé, depuis des mois elle ne comprend rien à la politique des gouvernements successifs mais elle était tout de même bien contente d’être Ministre !..
La loi Travail va "trop loin"
Concernant le projet de loi Travail, Marylise Lebranchu regrette que l'avant-projet de loi El Khomri "aille trop loin, trop c'est trop". "En plus, le débat a été tué quand la ministre (du Travail) a parlé de 49-3 avant même que le texte soit présenté en conseil des ministres", relève-t-elle, évoquant "une erreur grave".
Il y a, selon elle, des "points à revoir", à "retravailler avec les syndicats et les parlementaires" : le plafonnement des indemnités aux prudhommes ou encore l'encadrement des accords d'entreprises. Sur ces sujets, "il est très difficile de raisonner de manière désincarnée quand on gagne plus de 5.000 euros - c'est le cas des députés, des ministres, des fonctionnaires, des dirigeants du Medef".
"La notoriété personnelle prend le pas sur l’intérêt du pays"
"J'en ai assez d'entendre parler, depuis des années, de faire tomber les tabous", poursuit Marylise Lebranchu dans Mediapart. "C'est le signe de l'influence de la notoriété médiatique [...] : pour avoir sa première couv' d'un hebdomadaire, il faut dire que les 35 heures c'est mal comme l'a fait Emmanuel Macron", proteste-t-elle. Et de poursuivre : "En réalité, il ne s’attaque pas à des tabous, mais à des fondamentaux. Tout cela est fatigant. Parce que la notoriété personnelle prend le pas sur l’intérêt du pays."
L'ancienne ministre assure également s'être posé la question de quitter le gouvernement lorsque Christiane Taubira est partie fin janvier. "Mais je me disais qu'en tant que responsable politique, je ne pouvais ajouter un petit élément à un petit élément de crise", explique-t-elle, ajoutant que si elle avait été députée elle aurait voté contre la déchéance de nationalité.
Source : leJDD.fr 2 mars 2016