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5 août 2014 2 05 /08 /août /2014 11:00

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À chaque catastrophe, les politiques adoptent un protocole compassionnel exagéré. Pas besoin d'action si l'on a de la compassion, aucune urgence à réformer tant que l'on peut soupirer. Les responsables du pays préfèrent la pommade à la chirurgie. 

Longtemps, les crocodiles politiques n'ont montré que leurs dents et leur cuir ; les voici qui usent et abusent d'une arme plus moderne et bien pernicieuse : les larmes. Les démocraties ont, désormais, adopté un protocole compassionnel exagéré, funeste et émollient, qui voit leurs dirigeants se précipiter, toutes affaires cessantes et avec des mines de circonstance, à chaque catastrophe. Pourvu, bien sûr, qu'elle soit médiatique et saisisse les esprits, c'est-à-dire que tous les citoyens la regardent à la télévision et que chacun s'identifie aux victimes, d'un tremblotant "ça aurait pu être moi". Ainsi, les noyés de Lampedusa comptent moins que les crashés de Ouagadougou, les enfants tués sur la route d'à côté émeuvent plus que leurs cousins assassinés en Syrie et chaque soldat qui tombe aujourd'hui est mieux honoré que 20 000 poilus périssant dans les blés d'août 1914.

Certes, les politiques ne font rien d'autre, ici, que suivre le diktat des médias, ces marchands de chagrins collectifs. Mais rien ne les empêche de briser là et d'offrir un visage d'airain à la fatalité : être humain, ce n'est pas être mièvre, on peut consoler sans gémir. De même, rien n'oblige les dirigeants à mettre en scène le soulagement d'un retour d'otages, ni à exploiter la joie collective d'un éphémère et chanceux succès sportif, et ils seraient mieux inspirés d'alerter leurs peuples sur les faux-semblants de ces triomphes de pacotille. Mais, pour quelques points à gagner - ou à ne pas perdre - dans les sondages, les élus de droite comme de gauche bradent le caractère qui sied aux chefs pour se livrer à des émois de midinette.

La pleurnicherie n'est pas la générosité

Cet abandon aux moeurs délavées de l'époque est avant tout une ruse, qui permet aux politiques de fuir une fois de plus leurs responsabilités. Pas besoin d'action si l'on a de la compassion, aucune urgence à réformer tant que l'on est capable de soupirer. De même, parce que cela leur rapporte plus à court terme, les responsables du pays préfèrent la pommade à la chirurgie, et s'échinent à réparer les dégâts et balayer les ruines plutôt qu'à reprendre les fondations de l'édifice.

Mais cette faiblesse a une conséquence plus profonde : elle détruit l'esprit de nation au profit de l'individu roi. Bien sûr, c'est un progrès que de considérer chaque être humain comme unique, sans le noyer dans la masse, et de porter à toute vie la même attention. Mais le sens du sacrifice et l'idée que quelque chose, qui s'appelle la France, dépasse la personne disparaissent en cette mutation. Il est du devoir des responsables politiques de protéger le collectif tout en considérant le particulier, donc de trouver les mots justes pour celui qui souffre sans transformer les Français en peuple de victimes potentielles, car cela les changerait aussitôt en assistés et en pleutres. Bref, le pouvoir doit savoir être insensible sans être inhumain, et dépasser les douleurs, non s'y complaire.

Il fut un temps où c'était déjà vertu que l'excès d'émotion, où il fallait se montrer en larmes au théâtre, devant la tragédie à la mode ou le dernier mélo à succès : au creux du XVIIIe siècle français, poudré et perruqué, l'alanguissement mondain n'empêchait nullement la violence de classe, et il n'était qu'un voile de sensiblerie posé sur un système impitoyable. La pleurnicherie n'est pas la générosité, et cet ordre social s'est effondré à force de ne rien voir et de ne rien changer. Petits chefs et vrais puissants d'aujourd'hui doivent le savoir : leurs soupirs ne leur vaudront aucune indulgence en cas de révolution. Que leurs larmes coulent en abondance n'empêchera pas leur sang, si ça tourne mal, de faire de même...

 

 

 

 

 

 

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