Au moment où démarre le projet Bugatti « type 57 » c’est le fils d’Etore Bugatti, Jean qui dirige l’équipe de designers de la firme. Il vient d’avoir 23 ans et débute dans le métier mais il a de qui tenir.
La Société Bugatti n’est pas au mieux. Les modèles très luxueux, mais très chers, tels que la type 41 Royale ou la type 50 n’ont pas été de grands succès commerciaux. Il a donc été décidé d’une part de construire plusieurs modèles différents sur la base d’un châssis commun, ensuite de réduire les dimensions du véhicule comme celles du moteur. Les premiers projets du type 57 sont basés sur un moteur 8 cylindres en ligne de 2,8 litres de cylindrée ; moitié moins que le type 50 précédent. Les modèles de production recevront finalement un moteur de 3 257 cc de cylindrée développant 135 cv dans sa version « aspiration naturelle »
Quatre modèles de carrosserie sont alors étudiés sur la base du châssis type 57 : 4 places, deux portes « Ventoux », 4 portes « Galibier », le 2 portes convertible « Stelvio » et le 2 places coupé « Atalante ». Comme à son habitude c’est l’équipe de style interne à l’entreprise qui dessinera presque toutes les variantes de carrosseries. Seul le modèle Stelvio est confié au carrossier français Gangloff.
La Bugatti Type 57 Atalante est un dérivé du coupé Aérolithe. L'Aérolithe a conduit à la production en nombre limité du Type 57 Atlantic, qui à son tour a amené Jean Bugatti à faire évoluer le design vers l'Atalante. Ces évolutions comprennent le passage à un pare-brise en une seule pièce et la création d'un coffre arrière pour le transport de bagages. Le concept a été créé par Jean Bugatti puis affiné et préparé pour la production par le styliste interne à l’entreprise Bugatti Joseph Walter.
L’histoire du coupé deux portes « Atlantic » démarre en 1935 quand Bugatti présente au salon de l’Automobile de Paris le prototype « Aérolithe » qui veut démontrer le savoir-faire de la marque en matière d’allègement et d’aérodynamique. La carrosserie de ce prototype est pour le moins originale car elle est réalisée en alliage de magnésium, l’« Electron » qui a pour principaux avantages d’être léger et résistant mais pour inconvénient majeur de ne pas pouvoir être soudé. Les panneaux de la carrosserie étaient donc assemblés par rivetage ce qui donnait à la carrosserie un aspect étrange en particulier avec cette ligne d’assemblage qui court de l’avant à l’arrière. Certains historiens ont tenté d’expliquer que le prototype « Aérolithe » n’avait pas été fabriqué avec le fameux alliage « Electron » mais qu’importe, Jean Bugatti va reprendre la technique de ce prototype pour réaliser le coupé « Atlantic » : assemblage par rivets mais, cette fois ci, avec des panneaux en aluminium.
Quatre exemplaires de ce superbe coupé « Atlantic » sont fabriqués par Bugatti. Le premier est équipé rapidement du moteur turbo compressé et les autres seront réactualisés avec cette version de moteur dans les mois suivants leur production. Aujourd’hui la Bugatti coupé « Atlantic » est considérée comme l’ultime création de Bugatti.
Le Type 57 Atalante est construit sur le châssis Bugatti Type 57S (le « S » signifie Surbaissé) qui était une conception nouvelle et sophistiquée qui abaissait la voiture de manière si significative qu'un carter sec était nécessaire pour le moteur. L’essieu arrière est suspendu par des ressorts à lames elliptiques inversés. La suspension avant est semi-indépendante et les freins sont à tambours sur les quatre roues et actionnés par câble, une disposition qui a toujours la préférence d'Ettore Bugatti.
Le moteur de la Type 57 Atalante est le huit cylindres en ligne DACT de 3,3 litres (3 257 cm3) utilisé dans les voitures de course Bugatti Type 59 et ce moteur va aussi propulser les voitures gagnantes de Bugatti Le Mans dans les années d'avant-guerre. Ce moteur est issu du Type 49 et de ses prédécesseurs, mais il a été considérablement amélioré par Jean Bugatti pour les Types 57 et 59. Il est monté dans le châssis Type 57S sur des supports en caoutchouc pour un silence accru.
Avant le début de la production, quatre prototypes de type 57 Atalante ont été construits. Parmi ces quatre figure la voiture présentée ici (châssis numéro 57254) achevée le 16 mai 1935. La carrosserie de cette voiture a été réalisée par la Carrosserie Bugatti dans leur usine de Molsheim. C’est Meo Costantini, qui prend livraison de ce prototype neuf jours plus tard sans doute pour essais. Meo Constantini est co-directeur de Bugatti et a été le Racing Manager de l’entreprise. Il a également remporté deux fois Targa Florio et c’est surement son goût pour la vitesse et la puissance qui le conduit à ramener le Type 57 Atalante à l'usine deux mois plus tard pour faire moderniser le moteur avec de nouveaux pistons, un collecteur d'admission spécial et pour réglage des guides de soupape et de l'arbre à cames.
La voiture qui n’a que 26 000 kilomètres au compteur a été entreposée depuis très longtemps puisqu’elle n’a parcouru que 700 kilomètres au cours des soixante dernières années. Elle a été présentée à la vente aux enchères Villa Erba par RM Sotheby’s le 22 mai 2017 où elle a été adjugée pour 3 024 000 euros.
Je recommande à tous les passionnés de l'automobile et de son histoire les remarquables sites (en anglais) cités ci-dessous. Ils présentent, outre des commentaires et données techniques très complètes, de magnifiques photos sur la production automobile mondiale
ultimatecarpage.com
wheelsage.org
favcars.com
mais il y a aussi un site en Hongrois sur lequel il faut se contenter de regarder les photos :
autogaleria.hu
Vous pouvez retrouver d'autres véhicules, tout aussi exceptionnels, dans la rubrique "VOITURES DE LEGENDE" de ce blog ou en vous inscrivant à la Newsletter (voir ci-contre)