Quand Enzo Ferrari fonde sa propre entreprise en 1947, il engage Gioacchino Colombo comme ingénieur en chef. Les deux hommes se connaissaient bien ; ils ont travaillé ensemble lorsque Enzo Ferrari était directeur d’équipe chez Alfa Romeo. Colombo reçoit pour mission de concevoir un nouveau moteur qui doit surpasser le moteur 8 cylindres Grand Prix qu’il avait conçu pour Alfa Romeo avant la guerre. Les règlements de la compétition automobile autorisent un moteur suralimenté avec une cylindrée maximale de 1,5 litre ou une unité avec aspiration naturelle dont la cylindrée peut aller jusqu’à 4,5 litres. La vaste expérience de Colombo avec la suralimentation fait que son choix se porte sur la première solution
Colombo va ainsi mettre au point un moteur V12 de 1,5 litre de cylindrée pour propulser la toute première Ferrari. Ce moteur, avec de nombreuses variantes de cylindrée, va équiper toutes les Ferrari jusqu’en 1950. La première année du championnat de Formule 1 consacre un moteur conçu par Colombo. Malheureusement pour lui, ce moteur est dans une Alfa Roméo qui remporte quasiment toutes les épreuves du championnat. Colombo est remercié et rapidement remplacé par Aurélio Lampredi qui entreprend la conception d’un nouveau moteur pour la saison 1951. Il ne choisit pas l’option retenue par Colombo et conçoit un moteur V12 de 4,5 litres à aspiration naturelle.
Pour économiser du poids, le bloc-cylindres et les culasses sont réalisées en alliage léger. Chaque rangée de cylindres est munie d’un seul arbre à cames et de deux soupapes par cylindre. Le moteur subit ses tests au cours de l’année 1950 et est prêt à affronter l’Alfa Romeo en 1951. Monté longitudinalement à l’avant de la Ferrari 375 F1, le V12 à 60° développe une puissance maxi d’environ 350 ch. La Ferrari devient ainsi un concurrent sérieux pour Alfa Roméo. La bataille va être rude durant toute la saison et Ferrari perd le championnat que lors de la dernière manche.
Les performances de Ferrari conduisent à des changements de politique chez Alfa Romeo et l’entreprise milanaise annonce son retrait des Grand Prix pour la saison 1952. Ferrari est alors la seule équipe disposant de voitures de F1 compétitive, les dirigeants du sport automobile décident alors de courir les championnats 1952 et 1953 avec les règlementations de la Formule 2. Le moteur Lampredi devient du coup obsolète pour les Grand Prix, mais sa carrière est loin d’être terminée. Le grand V12 va continuer sa vie dans une série limitée de voitures sportives Ferrari, les 375 MM construites en 1953 et 1954
Les premières voitures construites sont équipées du moteur Tipo 102 dans la configuration exacte des moteurs de Grand Prix. Pour des raisons de fiabilité, la plupart des voitures suivantes sont dotées d’un moteur Tipo 108 dont les paramètres alésage/course sont légèrement différents. Pinin Farina a fourni la plupart carrosseries pour les 26 exemplaires des 375 MM. Les plus courantes étaient les carrosseries de style Spyder ou Berlinetta. Les cinq autres 375 MM construites ont été équipés de carrosseries personnalisées pour certains des clients les plus fortunés de Ferrari.
L’heure la plus belle de la Lampredi V12 viendra aux « 24 Heures du Mans » 1954, où une 375 Plus avec une version de 4,9 litres de cylindrée du moteur remporte la victoire finale. Dans les années qui ont suivi, le moteur Lampredi n’a été utilisé que de façon marginale, principalement pour équiper des véhicules routiers Ferrari les plus exclusifs.
La voiture présentée ici (Châssis : 0476AM) est l’une des cinq 375 MM qui n’a pas fini en voiture de compétition. Celle-ci a été carrossée par Ghia a été réalisée dans un bicolore assez inhabituel saumon et gris. Présenté au Salon de Turin en 1955, le châssis 0476AM avait été commandé par le collectionneur américain Robert C. Wilke, qui, à un moment donné, a possédé sept Ferraris, dont la plupart ont été construites sur mesure pour lui. Il était le propriétaire de la société Leader Card et un commanditaire éminent d’une équipe Indy 500 des années 1930 jusqu’à sa mort en 1970. Dessinée par Giovanni Savonuzzi cette 375 MM Coupé Speciale est sans aucun doute sa Ferrari la plus extravagante, et aussi la dernière Ferrari carrossée par Ghia. Wilke conservera la voiture jusqu’à sa mort et n’aura parcouru que 12000 km. La seule modification effectuée pendant cette période fut l’ajout de ceintures de sécurité
En 1970, la Ferrari châssis 0476AM passe au fils de Wilke, Ralph, qui la vend au Dr. Robert E. Steiner qui va la conserver pendant près d’une décennie. Elle passe ensuite entre les mains de plusieurs collectionneurs renommés et amateurs de Ferrari comme Ed Jurist, la collection Blackhawk et Erich Traber de la Suisse. En 2007, la Ferrari retourne aux États-Unis où elle retrouve ses couleurs d’origine. La Ferrari 375MM Ghia Coupé Speciale a survécu dans un état remarquablement original. Avec seulement 13,1367 km au compteur kilométrique, elle a été expédiée à la vente 2019 RM Sotheby’s Monterey avec une estimation de 5-7 millions de dollars avant la vente.
Je recommande à tous les passionnés de l'automobile et de son histoire les remarquables sites (en anglais) cités ci-dessous. Ils présentent, outre des commentaires et données techniques très complètes, de magnifiques photos sur la production automobile mondiale
ultimatecarpage.com
netcarshow.com
favcars.com
mais il y a aussi un site en Hongrois sur lequel il faut se contenter de regarder les photos :
autogaleria.hu
Vous pouvez retrouver d'autres véhicules, tout aussi exceptionnels, dans la rubrique "VOITURES DE LEGENDE" de ce blog ou en vous inscrivant à la Newsletter (voir ci-contre)