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5 février 2018 1 05 /02 /février /2018 09:00

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LES ACTEURS DE LA REVOLUTION :  ROBESPIERRE (4/50)

 

Maximilien ROBESPIERRE peint à Arras en 1783 par Léopold Boilly

 

 

 

 

ENTREE A L'ACADEMIE D'ARRAS : 1783

 

 

 

 

 

     Robespierre plaide maintenant avec plaisir, réconforté par ses premiers succès. Plus question, pour lui, d'abandonner comme il y avait songé lors de ses débuts. Mais, si son métier d'avocat le passionne, il aime également écrire. C'est pour cette raison que, toujours patronné par Maître Buissart, Maximilien va tenter de se faire connaître dans les milieux littéraires. Il entre effectivement à l'Académie d'Arras le 15 Novembre 1783 et reçoit, à cette occasion, l'aide d'une personnalité de la région : Monsieur Dubois de Fosseux, riche châtelain, ancien écuyer du roi, épris des arts et des lettres.

    Reconnu pour son talent, Robespierre se risque alors à répondre à l'un de ces nombreux concours lancés par les Académies de provinces ; il soumet à l'Académie d'Amiens un « Eloge de Gresset ». Pourquoi choisit-il Gresset, poète totalement inconnu dont le seul mérite est, sans doute, d'écrire dans un genre littéraire nouveau, mais très controversé à l'époque : le drame ? Robespierre fait-il ce choix par soucis d'originalité, par défi ? Toujours est-il qu'il prend résolument parti pour ce genre avec la force de conviction qu'on lui connaît maintenant.

 

« Je ne sais quelle manie pousse une foule de critiques à déclamer contre ce genre nouveau avec une sorte de fanatisme. Ces fougueux censeurs, persuadés que la nature ne connaissait que des tragédies et des comédies, prenaient tout ouvrage dramatique qui ne portait pas l'un de ces deux noms pour un monstre de littérature (...) ; comme si la nature n'avait que deux tons, et qu'il n'y eut pas de milieu pour nous entre les saillies de la gaieté et les transports des plus furieuses passions (...) C'est en vain qu'ils ont voulu nous persuader qu'il n'était permis de s'attendrir que sur les catastrophes des rois et des héros ; tandis qu'ils faisaient des livres contre les drames, nous courrions au théâtre les voir représenter, et nous éprouvions que nos larmes peuvent couler avec douceur pour d'autres malheurs que ceux d'Oreste et d'Andromaque. »  (1)

 

     Son « Eloge de Gresset » n’aura pas un retentissement considérable mais, tout de même, l’écrivain en herbe vient de franchir un pas. Il participera à d'autres concours, notamment sur un sujet autrement grave : « Quelle est l'origine de l'opinion qui étend sur tous les individus d'une même famille une partie de la honte attachée aux peines infamantes que subit un coupable », thème proposé par l'Académie Royale de Metz (2). Robespierre, dans son texte, pourtant extrêmement modéré, fait montre d'une assurance qu'il n'a pas eu encore loisir d'exprimer. Il n'hésite pas à réclamer l'égalité des peines pour tous les citoyens, y compris les nobles « dont les crimes sont toujours moins excusables que ceux des malheureux poussés au mal par la misère. »  (3)

     La Société Royale de Metz, qui n'a sans doute pas apprécié toutes ses prises de positions, ne lui décerne que le deuxième prix. Robespierre ne s'en trouve pas très honoré : il n'est pas homme à se satisfaire de la deuxième place !..

 

     Maintenant qu'il est presque à l'abri des soucis financiers, il peut se consacrer davantage à l'écriture pour son plaisir. Mais ce n'est pas par cette voie qu'il parviendra à la vraie célébrité et il commence à s'en rendre compte.

     Pourtant, ses protecteurs d'Arras, notamment Maître Buissart et Dubois de Fosseux,  continuent à lui faire confiance pour ses qualités littéraires : à la faveur du décès du titulaire, il sera élu en Février 1787 « Directeur de l'Académie Royale des Belles Lettres d'Arras ». A cette même époque, il est accueilli par les Rosati d'Arras, petite Société poétique fondée en 1778. A ces divers titres, Robespierre parvient à s’introduire dans le petit monde très fermé des notables de la ville ; il fréquente les salons, préside régulièrement et avec beaucoup de sérieux, les séances de l'Académie. Par contre, ses multiples occupations ne lui laissent plus guère de temps... pour la littérature !

 

    De ces années ont été conservées quelques belles pages de discours académiques, qui font un peu sourire lorsque l'on a à l'esprit l'image du conventionnel ou celui de l'orateur des Jacobins. Le plus significatif de ces textes est son « Eloge à la Rose » écrit en réponse au discours de réception d'un Rosati :

 

«  Mais ce n'est pas tout de vivre longtemps, les Rosatis ont encore l'avantage de vivre beaucoup ; car tous leurs moments sont remplis par de bonnes actions ; enfin, ils vivent agréablement ; d'abord une des plus précieuses prérogatives d'un Rosati, c'est que sa maîtresse ne peut jamais lui être infidèle ; il n'est pas moins sûr de la constance de ses amis ; du moins en trouve-t-il toujours dans ses frères ; ce n'est pas tout, s'il a embrassé l'état du mariage, il peut se reposer même sur la vertu de sa femme ; exempt de la loi commune, il peut échapper à toutes les disgrâces qui semblent menacer le vulgaire des maris, et jamais aucun obstacle ne dérange sur son front la couronne de fleurs dont il est orné ; enfin, la vie d'un Rosati est un printemps continuel et partout les roses naissent en foule sur ses pas. Telle est notre destinée dans cette vie : mais lorsque nous serons parvenus au temps que les arrêts du destin ont marqué à notre séjour sur la terre, alors vainqueurs de la mort même, nous serons transportés sur un nuage brillant dans l'Elysée, où nous irons rejoindre nos illustres frères, Anacréon, Chaulieu, Trajan, Marc-Aurèle, et tous les demi-dieux qui ont fait la gloire du nom Rosati. C'est là que nous trouverons encore Sapho, Aspasie, Sévigné, La Suze, La Fayette et toutes les admirables sœurs dont les charmes changeraient le Tartare même en un lieu de délice ; c'est là que nous passerons des jours fortunés tantôt à leur chanter des vers charmants inspirés par les Grâces, tantôt à les enlacer de guirlandes de roses que nous aurons composées avec elles dans les riants détours d'un bocage enchanté ou dans le doux asile d'une grotte tapissée d'une éternelle verdure. Que dis-je, la déesse elle-même viendra souvent se communiquer à nous et sa présence nous rendra les ravissements ineffables qui pensèrent jadis nous faire expirer de plaisir, mais dans cet état de gloire et de félicité nos sens auront acquis une vigueur nouvelle qui nous rendra capables de soutenir de sa part de plus longs entretiens et un commerce plus intime.

«  C'est le bonheur que je vous souhaite. tel est le bonheur qui vous attend si, fidèles à la grâce de votre vocation, vous vous montrez toujours zélés à remplir les engagements sacrés qu'elle vous impose; en deux mots, aimez la rose, aimez vos frères; ces deux préceptes renferment toute la loi...In his duobus tota lex est. »  (4)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(1)   Ernest HAMEL "Histoire de Robespierre" , Paris, 1867, Vol 2, pages 52 et suivante.

Egalement in Cl. MANCERON "Les Hommes de la Liberté"   op. cit. Vol. 5, p. 368   

 

(2)   Claude MANCERON "Les Hommes de la Liberté"   op.cit.  Vol 5, pages 368-369

 

(3)   Ernest HAMEL "Histoire de Robespierre"  op. cit. Vol 2,  page 52

 

(4)   cité par Albert MATHIEZ  "Etude sur Robespierre"

        Messidor Editions Sociales, Paris, 1988, pages 39-40

 

 

 

 

 

 

 

A SUIVRE :

 

 

LES ACTEURS DE LA REVOLUTION : ROBESPIERRE (5/50)

 

LE TOURNANT D'UNE CARRIERE : 1786 - 1788

  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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