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La foule demande la suppression de la "Commission des Douze"
LA COMMISSION DES DOUZE : 17 - 31 MAI 1793
Compte tenu du climat qui règne à la Convention, climat qui se dégrade un peu plus chaque jour, chacun sait maintenant que de très graves événements se préparent. Le 17 Mai Camille Desmoulins* présente au Club des Jacobins un nouveau pamphlet : « Histoire des Brissotins, ou Fragments de l'Histoire secrète de la Révolution ». Le talent de Camille Desmoulins va jeter encore un peu plus d’huile sur le feu. Dès le lendemain, la Gironde s'empresse de répliquer, par la voix de Guadet, en demandant que soient cassées les autorités parisiennes « avides à la fois d'argent et de domination ». La Convention, sur la proposition de Barère, décrète alors la création d'une commission de douze membres chargée d'enquêter sur les activités des autorités de la capitale.
La commission, dite « Commission des Douze », est rapidement élue. Elle est composée exclusivement de députés girondins ce qui ne manque pas de raviver, encore un peu plus, les tensions qui règnent au sein d'une Assemblée qui n'avait pas besoin de cela. Mais on se souvient que lorsque le Comité de salut Public a été constitué il ne comportait aucun membre de la gironde !.. Donc, c’est peut être là le juste retour des choses !.. La commission va travailler vite : dès le 24 Mai, elle rend ses premières conclusions sous la forme d'un projet de décret dont l'Article 1er va être à l'origine d'un débat passionné. L'article en question stipule, en effet, que : « La Convention nationale met sous la sauvegarde spéciale des bons citoyens la fortune publique, la représentation nationale et la ville de Paris ». Qu'entendent les Girondins par « bons citoyens » ?
Sans poser ouvertement la question, et sans donner l'impression de combattre le projet dans son ensemble, Danton, très habilement, va concentrer ses critiques sur cet article « douteux »:
« L'objet de cet article n'a rien de mauvais en soi. Sans doute la représentation nationale a besoin d'être sous la sauvegarde de la nation. Mais comment se fait-il que vous soyez assez dominés par les circonstances pour décréter aujourd'hui ce qui se trouve dans toutes les lois ? Sans doute l'aristocratie menace de renverser les libertés, mais quand les périls sont communs à tous, il est indigne de nous faire des lois pour nous seuls, lorsque nous trouvons notre sécurité dans celles qui protègent tous les citoyens. Je dis donc que décréter ce qu'on vous propose, c'est décréter la peur... »
UN DEPUTE : « Eh bien ! J'ai peur, moi !... »
DANTON : « Je ne m'oppose pas à ce que l'on prenne des mesures pour rassurer chaque individu qui craint pour sa sûreté; je ne m'oppose pas à ce que vous donniez une garde de crainte au citoyen qui tremble ici. Mais la Convention nationale peut-elle annoncer à la République qu'elle se laisse dominer par la peur ? Remarquez bien jusqu'a quel point cette crainte est ridicule. Le comité vous annonce qu'il y a des dispositions portant qu'on a voulu attenter à la représentation nationale. On sait bien qu'il existe à Paris une multitude d'aristocrates, d'agents soudoyés par les puissances; mais les lois ont pourvu à tout; on dit qu'elles ne s'exécutent pas; mais une preuve qu'elles s'exécutent, c'est que l'Assemblée nationale est intacte et que, si un de ses membres a péri, il était du nombre de ceux qui ne tremblent pas. Remarquez bien que l'esprit public des citoyens de Paris qu'on a tant calomniés.... ... » (1)
L'Assemblée, en effet, est encore intacte. Mais pour combien de temps encore ? Et Danton qui s'évertue à démontrer que le projet qu'il n'ose pas combattre est inutile à ses yeux, ne sait-il pas que, dans Paris, on se prépare à purger la Convention de ceux que l'on accuse de traîtrise ?
« Je ne dis pas que ce soit calomnier Paris que de proposer le projet de décret qui vous est présenté; mais on a calomnié Paris, en demandant une force départementale; car, dans une ville comme Paris, ou la population présente une masse si imposante, la force des bons citoyens est assez grande pour terrasser les ennemis de la liberté. »
« Je dis que, si, dans la réunion dont on a parle, il s'est trouve des hommes assez pervers pour proposer de porter atteinte a la représentation nationale, cette proposition a été vivement repoussée, et que si ces hommes sont saisis et peuvent être livrés à la justice, ils ne trouveront point ici de défenseurs. On a cherché aussi à inculper le maire de Paris, et à le rendre, pour ainsi dire, complice de ces hommes vendus ou traitres; mais l'on n'a pas dit que, si le maire de Paris n'était pas venu vous instruire de ce qui s'était passé, c'est qu'il était venu en rendre compte au Comité de Salut public, qui devait vous en instruire. Ainsi donc, quand il est démontré que les propositions qui ont été faites ont été rejetées avec horreur; quand Paris est prêt à s'armer contre tous les traitres qu'il renferme pour protéger la Convention nationale, il est absurde de créer une loi nouvelle; pour protéger la représentation nationale, il ne s'agit que de diriger l'action des lois existantes contre le vrai coupable. Encore une fois, je ne combats pas le fond du projet, mais je dis qu'il se trouve dans les lois préexistantes. »
« Ne faisons rien par peur; ne faisons rien pour nous-mêmes; ne nous attachons qu'aux considérations nationales; ne nous laissons point diriger par les passions. Prenez garde qu'après avoir créé une commission pour rechercher les complots qui se trament à Paris, on ne vous demande s'il ne conviendrait pas d'en créer aussi une pour rechercher les crimes de ceux qui ont cherché à égarer l'esprit des départements. Je ne demande qu'une chose, c'est que les membres qui proposent ce projet se dépouillent de toutes leurs haines. Il faut que les criminels soient bien connus, et il est de votre sagesse d'attendre un rapport préliminaire sur le tout. » (2)
La fin du discours de Danton précise la menace qui pèse sur la Gironde. Une raison de plus pour que les députés Girondins, auxquels vont se joindre une partie des députés de la Plaine, votent le décret séance tenante. Et la Commission des Douze ne va pas s'en tenir là : le soir même, elle fait arrêter un certain nombre d'agitateurs de la capitale dont Hébert (3).
Jacques René Hébert
L'arrestation du « Père Duchesne », comme celle de l'Ami du Peuple, quelques semaines auparavant, met à nouveau le feu aux poudres. Aussitôt la nouvelle connue, la Commune se mobilise et, dès le lendemain, 25 Mai, elle réclame la mise en liberté d'Hébert. Une députation se présente à la barre de l'Assemblée et expose ses revendications. C'est Isnard qui préside et la réponse arrogante qu'il fait aux représentants de la Commune ne laisse aucun doute sur ses intentions : la Gironde ne redoute pas le conflit.
« Ecoutez les vérités que je vais vous dire... Si, par ces insurrections toujours renaissantes, il arrivait qu'on portât atteinte à la représentation nationale, je vous le déclare au nom de la France entière, Paris serait anéanti !... Bientôt on chercherait sur les rives de la Seine si Paris a existé... »
Un énorme vacarme couvre la fin des propos d'Isnard et Danton, en se levant, lui crie de sa voix puissante : « Président, je demande la parole sur votre réponse !.. » Il faudra attendre que le calme revienne, puis que quelques autres questions soient traitées avant que Danton ne puisse monter à la tribune sous les acclamations de l'aile gauche de l'Assemblée.
DANTON : « Assez et trop longtemps on a calomnié Paris en masse.. » (Applaudissements à gauche et brouhaha de l'autre côté de la salle)
PLUSIEURS VOIX : « Non, ce n'est pas Paris qu'on accuse, mais les scélérats qui s'y trouvent !.. »
DANTON : « Voulez-vous constater que je me suis trompé ? »
UN GRAND NOMBRE DE VOIX : « Oui ! Oui ! »
DANTON : « Ce n'est pas pour disculper Paris que je me suis présenté à cette tribune, il n'en a pas besoin. Mais c'est pour la République entière. Il importe de détruire auprès des départements les impressions défavorables que pourrait faire la réponse du président ».
« Quelle est cette imprécation du Président contre Paris ? Il est assez étrange qu'on vienne présenter la dévastation que feraient de Paris tous les départements, si cette ville se rendait coupable...Je me connais aussi, moi, en figures oratoires (murmures à droite). Il entre dans la réponse du président un sentiment d'amertume. Pourquoi supposer qu'un jour on cherchera vainement sur les rives de la Seine si Paris a existé ? Loin d'un président de pareils sentiments, il ne lui appartient que de présenter des idées consolantes. »
« Il est bon que la République sache que Paris ne déviera jamais des principes; qu'après avoir détruit le trône d'un tyran couvert de crimes, il ne le relèvera pas pour y asseoir un nouveau despote. Que l'on sache aussi que les représentants du peuple marchent entre deux écueils; ceux qui servent un parti lui apportent leurs vices comme leurs vertus. Si dans le parti qui sert le peuple il se trouve des coupables, le peuple saura les punir; mais faites attention à cette grande vérité, c'est que, s'il fallait choisir entre deux excès, il vaudrait mieux se jeter du coté de la liberté que rebrousser vers l'esclavage. En reprenant ce qu'il y a de blâmable, il n'y a plus partout que des républicains. »
« Depuis quelque temps les patriotes sont opprimés dans les sections. Je connais l'insolence des ennemis du peuple; ils ne jouiront pas longtemps de leur avantage; bientôt les aristocrates, fidèles aux sentiments de fureur qui les animent, vexeraient tout ce qui a porté le caractère de la liberté; mais le peuple détrompé les fera rentrer dans le néant. Qu'avons-nous à faire, nous, législateurs, qui sommes au centre des évènements? Réprimons tous les audacieux; mais tournons-nous d'abord vers l'aristocrate, car il ne changera pas. »
« Vous, hommes ardents, qui servez le peuple, qui êtes attachés à sa cause, ne vous effrayez pas de voir arriver une sorte de modérantisme perfide; unissez la prudence a l'énergie qui vous caractérise, tous les ennemis du peuple seront écrasés. »
« Parmi les bons citoyens, il y en a de trop impétueux, mais pourquoi leur faire un crime d'une énergie qu'ils emploient à servir le peuple? S'il n'y avait pas eu des hommes ardents, si le peuple lui-même n'avait pas été violent, il n'y aurait pas eu de révolution. »
« Je reviens à mon premier objet: je ne veux exaspérer personne parce que j'ai le sentiment de ma force en défendant la raison. Sans faire mon apologie, je défie de me prouver un crime. Je demande que l'on renvoie devant le tribunal révolutionnaire ceux qui auront conspiré contre la Convention; et moi, je demande à y être renvoyé le premier, si je suis trouve coupable. On a répète souvent que je n'avais pas rendu mes comptes. J'ai eu 400.000 livres a ma disposition pour des dépenses secrètes; j'ai rendu compte de l'emploi que j'en ai fait; que ceux qui m'ont fait des reproches les parcourent avant de me calomnier. Une somme de 100.000 livres avait été remise entre mes mains pour faire marcher la Révolution. Cette somme devait être employée d'après l'avis du Conseil exécutif; il connait l'emploi que j'en ai fait; il a, lui, rendu ses comptes. »
PLUSIEURS VOIX : « Ce n’est pas la question ! »
DANTON : « Je reviens à ce que souhaite la Convention; il faut réunir les départements; il faut bien se garder de les aigrir contre Paris ! Quoi ! Cette cité immense, qui se renouvelle tous les jours, porterait atteinte à la représentation nationale ! Paris, qui a brisé le premier le sceptre de fer, violerait l'Arche sainte qui lui est confiée ! Non ! Paris aime la Révolution; Paris, par les sacrifices qu'il a faits à la liberté, mérite les embrassements de tous les Français. »
« Ces sentiments sont les vôtres, eh bien! Manifestez-les; faites imprimer la réponse de votre président, en déclarant que Paris n'a jamais cessé de bien mériter de la République, puisque la municipalité.... (Il s'élève de violents murmures dans une grande partie de la salle). Puisque la majorité de Paris a bien mérité.... (On applaudit dans toutes les parties de la salle), et cette majorité, c'est la presque totalité de Paris. (Mêmes applaudissements). Par cette déclaration, la nation saura apprécier la proposition qui a été faite de transporter le siège de la Convention dans une autre ville. Tous les départements auront de Paris l'opinion qu'ils doivent en avoir, et qu'ils en ont réellement. Paris, je le répète, sera toujours digne d'être le dépositaire de la représentation générale. Mon esprit sent que, partout ou vous irez, vous y trouverez des passions, parce que vous y porterez les vôtres. Paris sera bien connu; le petit nombre de conspirateurs qu'il renferme sera puni. »
« Le peuple français, quelles que soient vos opinions, se sauvera lui-même, s'il le faut, puisque tous les jours il remporte des victoires sur les ennemis, malgré nos dissensions. Le masque arraché à ceux qui jouent le patriotisme et qui servent de rempart aux aristocrates, la France se lèvera et terrassera ses ennemis. » (4)
François Hanriot
Le lendemain, 26 Mai, à l'appel de Robespierre* et de Marat*, les Jacobins se déclarent en état d'insurrection. Mais c'est le 27 que la tension est à son comble. Les débats à l'Assemblée atteignent une violence que jamais encore la Convention n'a connue. La Commission des Douze a, en effet, fait arrêter, dans la nuit, le Président et le Secrétaire de la Section de la Cité. La section envoie donc une députation à la barre et Isnard, qui occupe toujours le fauteuil de Président, fait une réponse sur le ton qui lui est maintenant habituel. Le tumulte se répand aussitôt parmi les députés, des insultes s'échangent, des huées partent des tribunes. Robespierre* demande la parole dans le vacarme : on la lui refuse. Danton, de sa place, lance alors de sa voix tonitruante :
« Je vous le déclare, tant d'impudence commence à nous peser. Nous vous résisterons... ! »
Des cris fusent des bancs de la gauche : « Nous résisterons !..Nous résisterons !.. » Le tumulte est indescriptible; les amis de Danton lui crient de monter à la tribune et ce n'est qu'après avoir réclamé la parole à plusieurs reprises que le tribun peut enfin s'exprimer :
DANTON : « Je déclare à la Convention et à tout le peuple français que si l'on persiste à maintenir dans les fers des citoyens qui ne sont que présumés coupables, dont tout le crime est un excès de patriotisme; si l'on refuse constamment la parole à ceux qui veulent les défendre; je déclare, dis-je, que, s'il y a ici cent bons citoyens, nous résisterons. »
« Je déclare en mon propre nom, et je signerai cette déclaration, que le refus de la parole à Robespierre* est une lâche tyrannie. Je déclare à la France entière que vous avez mis souvent en liberté des gens plus que suspects sur de simples réclamations, et que vous retenez dans les fers des citoyens, d'un civisme reconnu, qu'on les tient en charte privée, sans vouloir faire aucun rapport..... »
PLUSIEURS VOIX A DROITE : « C'est faux ! Le rapporteur de la Commission des Douze a demandé la parole ! »
DANTON : « Tout membre de l'Assemblée a le droit de parler pour et contre la Commission des Douze. C'est un préalable d'autant plus nécessaire que cette Commission des Douze tourne les armes qu'on a mises dans ses mains contre les meilleurs citoyens; cette commission est d'autant plus funeste qu'elle arrache à leurs fonctions des magistrats du peuple.... »
PLUSIEURS VOIX : « Et les commissaires envoyés dans les départements !... ».
DANTON : « Vos commissaires vous les entendrez...Si vous vous obstinez à refuser la parole à un représentant du peuple qui veut parler en faveur d'un patriote jeté dans les fers, je déclare que je proteste contre votre tyrannie, contre votre despotisme. Le peuple français jugera.... » (5)
Depuis quelques jours, la haine s'est emparée des deux camps rivaux. Le conflit, latent depuis de nombreux mois, éclate maintenant au grand jour.
En fin de soirée, alors que la présidence a été prise par Hérault de Séchelles et que de nombreux députés ont déjà quitté leur banc, on vote un décret rendant la liberté aux citoyens incarcérés et cassant la Commission des Douze. Hébert et ses amis sont libres; la Gironde vient de perdre sa dernière arme : la Commission était son ultime bouclier. Danton a pesé de tout son poids sur cette décision. Il croit à la victoire de la Montagne sur les Girondins et sait maintenant que l'issue du combat est proche....
Le 28 Mai, les députés Girondins, alertés dans la nuit, sont revenus en force à l'Assemblée. Ils parviennent, après un débat embrouillé et à l'issue d'un vote à une courte majorité, à faire rétablir la Commission des Douze, dissoute la veille. Les événements vont alors se précipiter : le lendemain, 29 Mai, alors que la Convention, qui fait mine sans doute de ne pas voir le danger, vote la Déclaration des Droits de l'Homme, la Commune et le Département organisent le mouvement défini par Robespierre*. Une assemblée des sections se réunit; un Comité des Six, composé d'artisans et d'employés, se met en place. Ces deux instances constituent le Comité Central réuni à l'Evêché.
Le 30, le Département convoque, aux Jacobins, les commissaires des sections. Le Comité de l'Evêché, quant à lui, décide de passer à l'action dans la nuit du 30 au 31 : la Commune est cassée et aussitôt réintégrée, Hanriot (6) est promu commandant de la Garde Nationale. Le tocsin sonne dans toute la ville.
La Convention se réunit, en toute hâte, dès six heures du matin et le long défilé des sections reprend demandant la dissolution de la Commission des Douze.
Thuriot (7) demande la dissolution immédiate de la Commission; Vergniaud prêche la conciliation et, sur sa proposition, la Convention, debout, jure de mourir à son poste.
Dehors, après que le canon eut tonné, la foule s'est massée dans les faubourgs, c'est alors que Danton intervient pour donner le coup de grâce à cette trop fameuse commission :
DANTON : « Il faut que Paris ait justice de la Commission; elle n'existe pas comme la Convention. Vous avez créé une commission impolitique... »
PLUSIEURS VOIX : « Nous ne savons pas cela...! »
DANTON : « Vous ne le savez pas ? Il faut donc vous le rappeler. »
« Oui votre commission a mérité l'indignation populaire (..) »
« Vous l'avez créée, non pour elle mais pour vous. Si elle est coupable vous en ferez un exemple terrible qui effrayera tous ceux qui ne respectent pas le peuple, même dans son exagération révolutionnaire. Le canon a tonné, mais Paris n'a voulu donner qu'un grand signal pour vous apporter ses représentations; si Paris, par une convention trop solennelle, trop retentissante, n'a voulu qu'avertir tous les citoyens de vous demander une justice éclatante, Paris a encore bien mérité de la Patrie (.. ) »
« La commission a été assez dépourvue de sens pour prendre de nouveaux arrêtés et de les notifier au Maire de Paris, qui a eu la prudence de répondre qu'il consulterait la Convention. Je demande la suppression de la Commission, et le jugement de la conduite particulière de ses membres. Vous les croyez irréprochables; moi je crois qu'ils ont servi leurs ressentiments. Il faut que ce chaos s'éclaircisse mais il faut donner justice au peuple.... »
QUELQUES VOIX : « Quel peuple ?.. »
DANTON : « Quel peuple dites-vous ? Ce peuple est immense, ce peuple est la sentinelle avancée de la République. Tous les départements haïssent fortement la tyrannie (..) Tous les départements applaudiront à votre sagesse, quand vous aurez fait disparaître une commission impolitique (...) »
« Et si quelques hommes vraiment dangereux, n'importe à quel parti ils appartiennent, voulaient prolonger un mouvement devenu inutile, quand vous aurez fait justice, Paris lui-même les fera rentrer dans le néant. Je demande froidement la suppression pure et simple de la Commission sous le rapport politique seul, sans rien préjuger, ni pour, ni contre; ensuite vous entendrez le commandant général, vous pendrez connaissance de ce qui est relatif à ce grand mouvement, et vous finirez par vous conduire en hommes qui ne s'effraient pas des dangers.. » (8)
Danton rejoint alors le Comité de Salut Public qui siège en permanence. Au sein de ce Comité, l'insurrection est désavouée par une majorité des membres : Barère, Bréard, Delmas et Cambon en particulier, voudraient que l'on prenne des dispositions pour faire cesser le mouvement populaire. Après une âpre discussion, le Comité prend enfin une décision qui semble donner satisfaction à tout le monde : dissolution de la Commission des Douze et ouverture d'une enquête sur les conspirations. C'est Barère qui est chargé d'aller présenter ces mesures à la Convention.
(1) Hector FLEISCHMANN "Discours civiques de Danton" op. cit. Pages 147-148
(2) idem page 149
(3) HEBERT (Jacques René) : Né le 15 Novembre 1757. Orateur des Jacobins et des Cordeliers, Hébert est avant tout le rédacteur d'un journal populaire d'une rare vulgarité : le "Père Duchesne". Membre de la Commune insurrectionnelle du 10 Août, il est un des adversaires les plus virulents des Girondins qui le feront arrêter le 24 Mai 1793. Mais les pressions de la Commune obligent la Convention à le libérer le 27 Mai suivant. Sous l'impulsion d'Hébert et des Enragés, seront votées les lois des suspects le 17 Septembre 1793 et la loi du maximum le 27.
Au début de 1794, alors qu'il lance un appel à l'insurrection et qu'il s'en prend au modérantisme de Robespierre*, celui ci décide de s'en débarrasser. Hébert sera arrêté dans la nuit du 13 au 14 Mars 1794 et guillotiné le 24 Mars.
(4) Hector FLEISCHMANN "Discours civiques de Danton" op. cit. Pages 150-155
(5) idem pages 156-158
(6) HANRIOT (François) : Né à Nanterre le 3 Décembre 1759. Fils du peuple, il est commis à l'octroi lorsque se déclenche l'émeute parisienne du 12 Juillet 1789. Il prend alors des responsabilités dans la section du Jardin des Plantes et joue un rôle important le 10 Août 1792.
Fidèle de Robespierre*, il est nommé en Mai 1793, Commandant provisoire de la Garde nationale de Paris et contribue à la chute des Girondins.
Le 9 Thermidor, il fera tout son possible pour délivrer ses amis. Il sera guillotiné le lendemain avec eux.
(7) THURIOT (Jacques Alexis) : Avocat au barreau de Paris, il entre dans l'histoire le 14 Juillet 1789 comme négociateur entre l'émeute et le Gouverneur de la Bastille. Elu à la Législative puis à la Convention, il vote la mort du roi.
Membre du Comité de Salut Public pendant quelques semaines, il démissionnera après s'être opposé à Robespierre*. Il sera alors exclu des Jacobins mais le 9 Thermidor il prendra sa revanche : Président de l'Assemblée il déploiera beaucoup d'énergie pour empêcher Robespierre* de parler. Il mourra en exil en 1818.
(8) Hector FLEISCHMANN "Discours civiques de Danton" op. cit. Pages 160-164
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LES ACTEURS DE LA REVOLUTION : DANTON (39/52)
LA FIN DE LA GIRONDE : 31 MAI - 2 JUIN 1793