Dès la prochaine rentrée de septembre, 2,8 millions de collégiens devraient bénéficier de cours particuliers gratuits, tel que promis par Emmanuel Macron. Mais qui s’en chargera et quel sera le coût?
C'est une mesure prioritaire pour la rentrée scolaire 2017. Le président Emmanuel Macron l'a promis pendant la campagne, le ministre de l'Education, Jean-Michel Blanquer, l'a confirmé ensuite : "L'objectif est que les enfants rentrent chez eux devoirs faits." Voilà qui devrait plaire aux parents. Mais la mise en œuvre soulève de nombreuses questions. Mardi 27 juin, les acteurs concernés sont invités à en discuter Rue de Grenelle.
A qui s'adresse ce dispositif?
Pour le moment, aux collégiens volontaires. En septembre, un soutien leur sera proposé dans les établissements hors réseau éducation prioritaire (les collèges REP et REP+ offrent déjà un accompagnement éducatif). Selon les estimations, près de 2,8 millions d'élèves en plus pourront bénéficier gratuitement d'une aide aux devoirs : quatre heures de soutien par semaine, par groupes d'une quinzaine d'enfants.
Sur le papier, l'idée est séduisante. Mais les associations de parents d'élèves aimeraient des précisions : "Il ne faudrait pas que cela prolonge trop la journée d'école ni que d'autres activités passent à l'as", s'inquiète-t-on à la FCPE. "Quels seront les impacts, par exemple sur l'organisation des transports scolaires? Quels seront les acteurs?", questionne-t-on à la Peep, pourtant favorable au principe.
Qui assurera l'aide aux devoirs?
"On ne peut pas se contenter de mettre les enfants dans une salle sous la surveillance de n'importe quel adulte », prévient Eric Charbonnier, expert à l'OCDE, qui juge la mesure intéressante. « Il faut des personnes qualifiées, c'est la base de la réussite."
Rue de Grenelle, on assure que la priorité sera donnée aux enseignants, rémunérés en heures sup. D'autres intervenants compléteront : assistants d'éducation, étudiants, retraités, volontaires du service civique ou de la réserve citoyenne… qui, c'est promis, suivront une formation. Pas sûr que cela suffise à rassurer les profs. Dans le Pas-de-Calais, la réunion avec le rectorat les a laissés sceptiques : « On nous a dit qu'il y aurait très peu de moyens en plus », s'agace Jean-François Carémel, secrétaire départemental du Snes, syndicat majoritaire. « C'est pour cela qu'ils font appel aux bénévoles! »
Comment coordonner les différents intervenants?
Comment vont collaborer les intervenants? Les responsables du service civique, de la Ligue de l'enseignement, de l'Afev et des associations spécialisées pourront en discuter mardi. "Nous regarderons les ressources existantes pour voir comment les articuler avec le travail des équipes enseignantes. L'idée n'est pas de piétiner ce qui existe", explique Yannick Blanc, président de l'Agence du service civique.
Car, sur le terrain, certaines associations sont déjà bien implantées. Les étudiants de l'Afev interviennent dans les quartiers populaires de 45 agglomérations. L'association Zup de co, qui a visiblement inspiré Emmanuel Macron, aide déjà 2.200 élèves dans une cinquantaine de collèges Rep et Rep+. Avec, dans chacun, un salarié à mi-temps (assurant le lien avec les enseignants), quatre à cinq recrues du service civique et une cinquantaine d'étudiants. "Quand nous sommes entrés dans les établissements, la machine à claques s'est mise en route », se souvient le fondateur François-Afif Benthanane. On nous disait : « Ce n'est pas votre rôle, les étudiants n'ont pas les compétences des profs! Je répondais que c'était mieux que de faire reposer les devoirs sur les parents."
Il faudrait 300 millions d'euros
Quel coût? Le ministère n'avance pas de chiffres – On ne sait pas combien d'élèves seront volontaires – mais assure que les dépenses entrent dans les dotations 2017. Côté service civique, Yannick Blanc évoque la possibilité de recruter autour de 10.000 volontaires, particulièrement entre septembre et novembre : "L'objectif est d'avoir 150.000 jeunes en service civique en 2017. Nous en sommes à 63.000. La marge est considérable!" Pour Zup de co, le budget s'élève à 42.000 euros par collège. "Pour généraliser, il faudrait 300 millions d'euros », calcule son fondateur, prudent. « A la rentrée prochaine, 300, 400, voire 1.000 collèges proposeront une aide aux devoirs, mais pas les 5.200 directement. Cela prendra trois ans. Le ministre n'est pas Merlin l'Enchanteur! »
Source : LeJDD.fr 27-06-2017