Parmi toutes les voitures développées par W.O. Bentley, les « speed six » occupent une place spéciale. Le modèle est présenté en octobre 1928 et les versions de compétition vont être imbattables durant les deux années suivantes. Et ceci malgré une très forte concurrence sur les circuits. Les versions routières reçoivent des carrosseries luxueuses dues aux talents des meilleurs carrossiers de l’époque tels Gurney Nutting ou Hooper. Seulement 182 exemplaires de la Speed Six ont été fabriqués et aujourd’hui ce modèle reste la plus belle voiture jamais réalisée par Bentley.
Comme toutes les Bentley conçues par le génial W.O Bentley les Speed Six trouvent leur origine dans le premier « 3 litre » construit en 1919 qui sera remplacé en 1926 par le modèle 6 ½ litre. C’est le premier modèle Bentley équipé d’un moteur six cylindres en ligne. Un modèle destiné à satisfaire les clients de plus en plus exigeants qui demandent plus de luxe et plus de confort donc des carrosseries plus lourdes et un châssis de plus en plus sophistiqué.
De son petit cousin de dimension plus modeste, le nouveau moteur six cylindres en ligne de Bentley a hérité la plupart des caractéristiques de conception. La commande des soupapes est compliquée, mais techniquement très originale. Un simple arbre à cames commande les quatre soupapes par cylindre. Un alésage de 100 mm et une course de 140 mm conduisent à une cylindrée de 6,6 litre. Alimenté par un carburateur le nouveau moteur développe une puissance maxi de 115 cv à 3 500 t/mn.
Le châssis est classique et constitué de poutres métalliques. Les essieux avant et arrière sont rigides et équipés de ressorts à lames semi-elliptiques et d’amortisseurs hydrauliques. Les freins tambour sont assez massifs car la « bête » est lourde (2 200 kg) surtout lorsqu’elle est lancée à la vitesse maxi (161 km/heure). La puissance est transmise aux roues arrière par l’intermédiaire d’une boîte de vitesses à quatre rapports. Le châssis roulant ainsi constitué est disponible dans plusieurs variétés de longueurs et d’empattements afin de pouvoir satisfaire tous les besoins des clients les plus exigeants.
Le modèle “Speed Six” se distingue du model standard 6 ½ litre par l’adjonction d’un deuxième carburateur ce qui porte la puissance maxi à 180 cv. Pour la saison 1929, W.O. Bentley fait réaliser une version compétition de la Speed Six équipée d’un moteur encore plus poussé qui développe 200 cv. Les débuts en compétition ne sont pas faciles, la voiture doit abandonner à Brooklands à cause d’une panne électrique. Mais la défaite en terre britannique est vite oubliée quand, le mois suivant, les « Bentley Boys » Woolf Barnato et Tim Birkin remportent les « 24 Heures du Mans » au volant de la « Old N°1 »
Mais malgré cette victoire dans la course prestigieuse du Mans, dans l’esprit de Tim Birkin c’est la suralimentation qui est l’avenir des moteurs de compétition. Pour la saison 1930 il développe une version suralimentée du dernier moteur Bentley de 4 ½ litre. Mais pour engager la voiture au « 24 Heures du Mans » le règlement exige que 50 exemplaires au moins soient fabriqués. W.O. Bentley n’est pas du tout favorable à cette solution. Il prétend que le moteur ne tiendra pas en endurance mais il a perdu beaucoup de son influence au sein de la Société et Birkin obtient finalement le feu vert pour son projet : le Bentley « Blower » sera engagé au Mans.
W.O. Bentley n’a qu’une seule façon de démonter qu’il a raison : la compétition elle-même. La piste va trancher entre les deux théories qui s’affrontent. Deux « Speed Six » vont dominer les grands évènements de la saison 1930. Woolf Barnato et Franck Clément remportent la victoire tant convoitée à Brooklands sur la « Old N°2 » devançant Sammy Davis et Clive Dunfee au volant de la « Old N°3 ». Au Mans les Bentley « Birkin » suralimentées doivent abandonner sur ennuis mécaniques laissant la victoire à Barnato et Kidston sur la « Old N°1 » qui devance une deuxième Bentley la « Old N°2 »
Malheureusement Bentley Motors Ltd. Ne revient pas sur les circuits pour la saison 1931. La conjoncture économique difficile oblige W.O. Bentley à vendre son entreprise à son rival Rolls-Royce. La « Six Speed » constitue, sans aucun doute, la plus belle réussite de la marque britannique durant l’ère W.O.. Heureusement la plupart des 182 exemplaires, y compris les trois voitures de l'équipe officielle, existent encore. Souvent équipés de carrosseries spectaculaires, ils sont aujourd’hui les plus recherchés de toutes les Bentley.
La voiture présentée ici (châssis HM2855) est la « Speed Six» qui a accompli le plus bel exploit en dehors des circuits automobiles. L’un des plus intrépides des Bentley Boys, Woolf Barnato a fait le pari, lors d’une fête à Cannes en 1930, qu’il pourrait battre le train bleu reliant Cannes à Calais. La course est programmée pour mars 1930 et, avec des conditions météorologiques épouvantables et malgré l’absence d’autoroutes en France, Le record est pulvérisé. Barnato s’amuse même à traverser la Manche et arrive à Londres avant que le train Bleu ne soit arrivé à Calais.
Encore appelée Blue Train Spéciale le célèbre et unique coupé « Speed Six » carrossé par Gurney Nutting est la propriété d’un collectionneur américain. La voiture est régulièrement exposée des deux cotés de l’Atlantique dans les concours d’élégance de prestige.
Je recommande à tous les passionnés de l'automobile et de son histoire les remarquables sites (en anglais) cités ci-dessous. Ils présentent, outre des commentaires et données techniques très complètes, de magnifiques photos sur la production automobile mondiale
ultimatecarpage.com
supercar.net
swisscarsighting.com
mais il y a aussi un site en Hongrois sur lequel il faut se contenter de regarder les photos :
autogaleria.hu
Vous pouvez retrouver d'autres véhicules, tout aussi exceptionnels, dans la rubrique "VOITURES DE LEGENDE" de ce blog ou en vous inscrivant à la Newsletter (voir ci-contre)