Les années 2000 avaient vu une frénésie d’alliances et de regroupement entre les constructeurs automobiles frappés de plein fouet par la crise mondiale. Quinze ans plus tard, les survivants des fusions entre grands groupes automobiles sont bien plus nombreux que prévu. À l'image de Renault et Nissan, les constructeurs ont su faire preuve d'opportunisme, de détermination et de pragmatisme pour construire des alliances ou des partenariats sur mesure. Un mouvement que le redressement du marché va relancer.
PSA Peugeot-Citroën prêt pour une grande alliance
Après leur mariage, scellé en 1974, Peugeot et Citroën ont mis vingt-cinq ans à vraiment travailler ensemble. Aujourd'hui, le groupe PSA multiplie les partenariats en attendant le grand jour. Son divorce avec l'américain GM l'a précipité dans les bras du chinois Dongfeng, il y a dix-huit mois. Mais le français est désormais prêt à "une opération transformante". Le redressement de ses résultats et son "retour dans la course", comme dit son président Carlos Tavares, lui permettent de prétendre à une alliance qui le propulserait enfin au rang de titan, celui d'un groupe vendant plus de 10 millions de voitures par an.
"Tous nos partenariats ont la même philosophie, insiste Patrice Lucas, directeur des programmes et de la stratégie du constructeur français, équilibre dans la relation et création de valeur." Exemple? De nouveaux véhicules avec GM lancés fin 2016, des usines partagées avec Toyota en République tchèque et Fiat en Italie, la fabrication de moteurs avec Ford, de systèmes électriques avec Mitsubishi, des coentreprises en Chine avec Dongfeng et Changan, en Iran avec Khodro, ou encore la production de la Bluesummer pour Bolloré…
Mercedes, BMW et Honda peuvent-ils rester seuls?
Course à la taille, chasse aux coûts et aux nouveaux marchés confrontent à la même problématique les champions allemands du premium, Mercedes et BMW et le japonais Honda. "L'heure n'est plus forcément aux mégafusions mais à des alliances stratégiques sur certains marchés ou autour de nouvelles technologies, notamment dans les moteurs", insiste Hadi Zablit, spécialiste auto au Boston Consulting Group. Même les constructeurs aux résultats solides sont concernés. Le rythme de développement de nouveaux modèles s'est accéléré ; 46 lancements sont attendus l'an prochain outre-Atlantique, puis 54 en 2017.
Les investissements pour faire face aux contraintes environnementales en Europe, aux États-Unis et en Chine sont aussi de plus en plus lourds. L'affaire Volkswagen et son trucage au contrôle antipollution ont rappelé que même pour le numéro un mondial, ces coûts sont considérables. "Il faut ajouter à cela de lourds efforts d'innovation pour embarquer toujours plus de technologie à bord, et développer la voiture connectée", explique Guillaume Crunelle, associé responsable de l'industrie automobile chez Deloitte.
Fiat-Chrysler sauvé par les États-Unis
Sergio Marchionne a été le premier à défendre le modèle du titan, en formant le couple italo-américain Fiat-Chrysler. Cette diversification géographique porte enfin ses fruits. Face à un marché compliqué en Italie et en chute libre au Brésil, ses ventes explosent aux États-Unis depuis le début de l'année, grâce à un nouveau rush des automobilistes vers les SUV, spécialité notamment de sa marque Jeep. Les économies d'échelle, elles, tardent à venir. Un classique pour ces fusions transatlantiques comme celle de l'allemand Opel. Entré dans la galaxie General Motors en 1929, il a dû attendre les années 1970 pour profiter à plein de son actionnaire américain. Même à l'intérieur de l'Europe, les rapprochements prennent du temps.
Conclu en 1991, celui entre Skoda et Volkswagen a mis huit ans à produire ses premiers effets. Le groupe allemand (VW, Skoda, Seat, Audi) n'a démontré la puissance de ses synergies industrielles qu'en 2012, avec la mise sur le marché de la Golf 7, issue de sa nouvelle plateforme. "Il y a autant de configurations que de situations", rappelle Patrice Lucas de PSA.