On peut reprocher beaucoup de choses à Alexis Tsipras, et le peuple grec a de nombreux reproches à lui faire mais on ne peut lui enlever une qualité : il est extrêmement habile en politique. Démissionnaire il y a quelques semaines, le Premier ministre grec sortant Alexis Tsipras, vainqueur des législatives en Grèce avec son parti de gauche radicale Syriza et désireux de mener rondement son retour, devrait former dès lundi 21 septembre un gouvernement durable chargé de mettre en œuvre le difficile plan d'aide au pays accepté à contre-cœur en juillet.
Au lendemain de sa victoire aux élections législatives, Alexis Tsipras devrait être nommé Premier ministre ce lundi 21 septembre. Malgré une forte abstention, autour de 44%, les électeurs grecs lui ont donc donné une deuxième chance.
Sur la quasi totalité (90%) des bulletins dépouillés, sa formation Syriza est créditée de 35,53% des voix, contre 28,05% au parti de droite Nouvelle Démocratie (ND), dirigé par Vangelis Meïmarakis. Les projections donnent 145 sièges à Syriza et 10 à ANEL (contre 149 et 13 dans le Parlement sortant), soit 155 sur 300 dans le nouveau Parlement. Par ailleurs, à la faveur de la crise des migrants, le parti néonazi Aube dorée semblait, selon les résultats partiels, conforter sa place de troisième parti du pays, avec 6,96% et 18 députés (un supplémentaire).
Un gouvernement de combat
«Dès demain (ndlr. lundi), nous nous retroussons les manches pour travailler dur», a-t-il lancé dimanche soir à ses sympathisants au centre d'Athènes, annonçant «un gouvernement de combat», prêt «à mener des batailles pour défendre les droits de notre peuple». Un gouvernement que les créanciers de la Grèce souhaitent voir rapidement opérationnel pour appliquer l'accord de réformes et de mesures budgétaires conclu cet été. Le patron de l'Eurogroupe des ministres des Finances de la zone euro, le Néerlandais Jeroen Dijsselbloem, s'est d'ailleurs fendu d'un tweet de félicitations au futur chef de l'exécutif, ajoutant attendre la «formation rapide d'un nouveau gouvernement» pour «continuer le processus de réforme».
Débarrassé de l'aile gauche de Syriza
Arrivé au pouvoir en janvier, Tsipras avait perdu sa majorité au Parlement en août, lors du vote par les députés du troisième plan d'aide au pays par l'UE et le FMI en cinq ans, d'un montant de 86 milliards d'euros. Il avait alors choisi de démissionner en août espérant obtenir un nouveau mandat plus solide. Pari réussi. Le leader grec de 41 ans va reconstituer la même alliance que lors de son premier mandat, avec les Grecs Indépendants (ANEL), parti de droite souverainiste dont les sondages prédisaient l'élimination. Les autres aspirants à entrer dans une coalition, le parti centriste To Potami ("la Rivière"), créé en 2014 par un ancien journaliste de télévision, Stavros Theodorakis, et le Pasok, le parti socialiste autrefois puissant, ont pris acte qu'Alexis Tsipras n'avait pas besoin d'eux, et se sont déclarés dans l'opposition.
Au passage, Alexis Tsipras s'est débarrassé de l'aile gauche de son parti : Unité populaire, qui rassemble les députés dissidents du Syriza, n'a pas réussi à trouver assez d'électeurs pour entrer au parlement. Ces frondeurs étaient opposés à l'accord européen du 13 juillet. Désormais, le Premier ministre n'aura donc pas à composer avec des personnalités aussi fortes que l'ancien ministre de l'Energie Panayiotis Lafazanis, favorable à un retour à la drachme, ou l'ex-présidente du Parlement, la pasionaria Zoé Konstantopoulou, qui prônait de ne pas rembourser la dette du pays.
Le retour de Tsipras suivi par toute l’Europe
Son retour au pouvoir sera suivi avec une attention particulière par les créanciers de la Grèce, UE et FMI, mais aussi par les dirigeants politiques européens. Dès l'annonce des premiers résultats, le leader de Syriza s'est d'ailleurs entretenu au téléphone avec le président du Parlement européen Martin Schulz, avec le président français François Hollande et avec le chancelier autrichien Werner Faymann. Cette nouvelle victoire sera également scrutée de près en Espagne, au Portugal et en Irlande, très touchés par la crise et où se déroulent d'importantes élections dans les prochains mois. «Les Grecs ont dit très clairement qui ils veulent comme Premier ministre», a twitté le secrétaire général du parti espagnol de gauche anti-libérale Podemos, Pablo Iglesias, félicitant son «ami» Alexis Tsipras. Il avait partagé la tribune de son dernier meeting de campagne vendredi à Athènes.
Source : LeParisien.fr 21-09-2015