La Turquie a mené un raid aérien vendredi 24 juillet contre des positions de l’Etat islamique en Syrie, quatre jours après un attentat perpétré sur son sol et attribué à l'organisation terroriste. Un tournant dans la politique du gouvernement turc, longtemps taxé de laxisme envers l’EI.
La Turquie est longtemps restée l’arme au pied face à l’Etat islamique. Cette période est révolue. Ankara a mené vendredi 24 juillet son premier raid aérien contre des positions des djihadistes en Syrie, au lendemain d’un accrochage entre des combattants islamistes et l’armée turque à la frontière du pays. Un sous-officier turc avait trouvé la mort dans l’affrontement.
Vendredi matin, trois F16 ont bombardé "deux quartiers généraux et un point de ralliement" de l’Etat islamique, dans la zone frontalière qui fait face à la ville turque de Kilis (sud). "L'opération menée contre l'EI a rempli son objectif et ne s'arrêtera pas", a affirmé devant la presse le Premier ministre Ahmet Davutoglu.
Cette confrontation intervient quatre jours après l’attentat qui a fait 32 morts à Suruç et qui a été attribué à Daech. Les autorités ont identifié un jeune Turc de 20 ans, Seyh Abdurrahman Alagöz, comme le "kamikaze". Selon la presse, il avait effectué un séjour en Syrie dans les rangs de l'EI.
Un tournant dans la politique turque
Cet attentat marque un tournant dans l’attitude de la Turquie envers Daech. Jusqu'alors, Ankara rechignait à s’engager dans la coalition internationale contre l’Etat islamique. Le gouvernement craignait de renforcer le président syrien Bachar el Assad, bête noire des dirigeants islamo-conservateurs turcs. La Turquie refusait également d'intervenir militairement en soutien aux milices kurdes de Syrie, par crainte de voir se constituer une région autonome hostile dans le nord du pays.
Confrontée à une menace croissante, la Turquie a changé son fusil d’épaule. Selon un responsable militaire américain, Ankara a enfin autorisé les Etats-Unis à utiliser plusieurs de ses bases aériennes, dont celle d'Incirlik (sud), pour mener des raids aériens contre des cibles de l'EI en Syrie ou en Irak. Une requête à laquelle le gouvernement turc a longtemps opposé un refus catégorique.
Alors que la Turquie constitue le principal point de passage des recrues djihadistes vers la Syrie, Ankara compte aussi défendre ses frontières. Selon le quotidien Hürriyet, le gouvernement envisage de déployer des dirigeables au-dessus des 900 km de sa frontière commune avec la Syrie et de doubler celle-ci par un mur afin d'empêcher les mouvements des djihadistes.
Coup de filet en Turquie
Les autorités turques ont également lancé vendredi 24 juillet matin dans tout le pays un coup de filet sans précédent contre des membres présumés de l'EI et des rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). 251 personnes ont été interpellées et placées en en garde à vue.
L’expansion de l’Etat islamique nourrit les tensions entre Ankara et la communauté kurde de Turquie. Elle accuse le gouvernement turc d'avoir fermé les yeux sur les activités de l'EI sur son sol. Les rebelles du PKK ont revendiqué le meurtre de deux policiers mercredi à Ceylanpinar, à la frontière syrienne, en riposte à l'attentat de Suruç, ville majoritairement kurde.
Source : leJDD.fr 24-07-2015