En général, les écrits de la Cour des Comptes sont murement pesés et très rarement sujets à caution. Les experts qui y siègent prennent leur temps, disposent de toutes les données et sont, par définition, impartiaux. Y aurait-il, dans ce cas particulier de la sécurité publique une exception ? En effet, la Cour des comptes critique dans un rapport la gestion par l'Etat des forces de la sécurité publique, notamment sur la période où Nicolas Sarkozy était ministre de l'Intérieur. L'actuel titulaire du Ministère de l’Intérieur, Claude Guéant, trouve que ce rapport manque d’objectivité. Il est furieux et l'a fait savoir dans une lettre aux magistrats.
Quand on se souvient comment Claude Guéant a tendance à mettre dans les chiffres plus ses désirs que les réalités, notamment pour ce qui concerne l’immigration, on a toutes les raisons de s’inquiéter. Quand fera-t-on la vérité sur les chiffres de la délinquance ? Qui à tort, qui à raison ? Si le Ministère dispose de toutes les données, qu’il les publie et qu’il les confronte à celles dont dispose la Cour des Comptes qui, a priori, devraient être les mêmes !..
Claude Guéant est furieux. Dans une lettre de cinq pages, le ministre de l'Intérieur évoque "un nombre important d'inexactitudes, d'erreurs d'analyse, d'oublis et d'appréciations manquant d'objectivité" contenus dans un rapport publié jeudi par la Cour des comptes et traitant des forces de sécurité publique. Dans ce texte de 250 pages, les sages de la rue Cambon éreintent la gestion de ces services de police et de gendarmerie et mettent en doute la baisse de la délinquance depuis 2002, date de l'arrivée de Nicolas Sarkozy à l'Intérieur.
La juridiction financière, qui dit avoir enquêté dans une cinquantaine de villes d'Ile-de-France, Rhône-Alpes ou Paca, estime que l'Etat "a consacré des moyens croissants budgétaires, technologiques et humains" à la sécurité publique, mais que les résultats sont "contrastés" au regard des statistiques qui ont montré un "recul des atteintes aux biens" mais une "hausse" des violences aux personnes. Cette "exigence d'une plus grande efficacité de la lutte contre la délinquance", ajoute la Cour en référence implicite à la politique sécuritaire impulsée par Nicolas Sarkozy dès 2002, "doit être satisfaite" depuis 2009 "avec des moyens en diminution" et une "hausse des dépenses de rémunérations".
Une bataille de chiffres..
Le rapport fustige l'état statistique de la police et de la gendarmerie, notant au passage qu'"en 2009 la reprise à la hausse de la délinquance a été évitée en grande partie par le refus des services d'enregistrer des plaintes" de victimes d'escroqueries. La baisse de la délinquance a résulté, selon les sages, du fort recul des vols d'autos et de dégradations de biens privés. La Cour pointe également la "coûteuse et complexe organisation du temps de travail dans la police" et le "peu de latitude pour (...) l'accumulation des heures à récupérer". En 2009, 30% du "potentiel théorique" de la sécurité publique étaient "indisponibles pour cause de congés, repos, maladies et autres absences". Elle met aussi en cause le "développement rapide mais coûteux" de la vidéosurveillance, allant jusqu'à mettre en doute les chiffres de celui-ci qui avançait le nombre de 20.000 caméras dans la rue en 2008 quand elles n'étaient que 10.000 pour la Cour.
Bref, pour Claude Guéant, les critiques sont trop nombreuses. Dans sa lettre à la Cour, le ministre oppose ses propres chiffres et interprétations. Lorsque les sages pointent du doigt une faible présence de policiers sur la voie publique, Claude Guéant avance qu'elle s'est améliorée de 10% entre 2005 et 2009. Le ministre regrette aussi que les rapporteurs mettent "en doute l'efficacité des systèmes de vidéosurveillance, qui sont pourtant très largement utilisés avec succès en France et à l'étranger". Il défend par ailleurs les outils statistiques qui, selon lui, "reflètent, en dépit de leurs limites, correctement la réalité" de la délinquance.
Les auteurs ont porté une appréciation sur "une période limitée", ajoute Beauvau, louant l'"effort de mobilisation" de ses troupes "recentrées sur leur cœur de métier". Dans sa réponse, le ministère de l'Intérieur est sévère "comme rarement", reconnaissent des sources internes à la Cour.
Informations MONTESQUIEU-VOLVESTRE, FRANCE, MONDE : Vous souhaitez être informé régulièrement sur les nouveautés mise en ligne sur ce Blog, inscrivez vous à la Newsletter (voir dans la colonne ci-contre)