En Lybie, la guerre économique ne fait que commencer. Après avoir aidé les rebelles à prendre le pouvoir, la France fait le forcing pour récolter les fruits d’un engagement militaire de la première heure. "La France a été en avance sur le plan politique, elle doit l’être sur le plan économique", justifie-t-on dans l’entourage du gouvernement. La Libye estime à 200 milliards de dollars ses besoins pour la reconstruction dans les dix prochaines années. Ces derniers jours, les ministres des Affaires étrangères, Alain Juppé, et de l’Industrie, Éric Besson, ont rappelé que le Comité national de transition (CNT) libyen "s’adresserait prioritairement aux pays qui l’ont aidé". Depuis fin août, le gouvernement encourage les entreprises françaises à se positionner pour décrocher des contrats. Preuve de son implication, la chambre de commerce franco-libyenne enverra la semaine prochaine une délégation d’une vingtaine d’entreprises françaises à Tripoli dont Vinci, Alcatel et Sanofi. Une autre, emmenée par le secrétaire d’État au Commerce extérieur, Pierre Lellouche, y retournera au mois d’octobre.
L’agacement des patrons français
La voie s’annonce déjà étroite. « La France a un capital sympathie qui est un atout, mais ne rêvons pas », réagit Michel Casals, le président de la chambre de commerce franco-libyenne. « La Lybie est et va redevenir un marché âpre ». Avant la guerre, la France occupait la sixième place des pays étrangers en Libye avec 1 milliard d’euros de ventes et 4 milliards d’euros d’achats. Il y a fort à parier que les entreprises françaises sur place avant la guerre reprendront leurs activités. Vinci et Aéroports de Paris (ADP) devraient boucler la construction de l’aéroport de Tripoli, Total reprendra ses deux plates-formes pétrolières et Bolloré la gestion du port de Misrata. Alcaltel-Lucent est assuré de remettre en ordre le réseau de télécommunications mobiles en Libye, un nouveau contrat pour l’opérateur.
Une concurrence acharnée
Pour la suite, rien n’est signé. "Le marché est à gagner, pas à prendre", souligne Thierry Courtaigne, directeur du Medef pour l’international. Les entreprises font profil bas. Elles ne veulent pas forcer les nouvelles autorités libyennes et commettre une erreur diplomatique. L’empressement du gouvernement agace même les dirigeants de plusieurs sociétés du CAC 40. "Il y a encore des combats à Tripoli, l’aéroport est fermé… Il y a un temps pour tout", lance le porte-parole d’un grand groupe énergétique. Chez Vinci, on estime qu’il est encore "un peu tôt" pour parler des contrats à venir. Des groupes, dont Total, pourraient même "sécher" le voyage de cette semaine et attendre la visite du secrétaire d’État au Commerce extérieur Pierre Lellouche. Leur prudence est d’autant plus forte que les entreprises françaises s’attendent à une concurrence acharnée. Les firmes américaines, italiennes, anglaises et chinoises sont à la manœuvre et déjà très bien implantées. "Dans le BTP, les Turcs cassent les prix tout comme les Chinois dans les télécommunications", détaille Michel Casals. Les dividendes français de la paix attendront.
Source : leJDD.fr 11-09-2011
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