Nicolas Sarkozy, lors de ses vœux aux français le 31 décembre dernier, y a fait allusion sans toutefois la nommer. Dès la fin du week end du Nouvel An les ténors du gouvernement ont annoncé la nouvelle : la TVA sociale est à l’ordre du jour. Un projet serait même en cours de préparation pour une mise en place avant les élections présidentielles si l’on en croit les plus bavards des ministres !.. On peut d’ailleurs s’interroger sur l’opportunité de ces « bavardages » alors que le Président a annoncé, dans le même discours, une grande table ronde avec les partenaires sociaux le 18 janvier destinée à prendre des « mesures importantes ». On accuse souvent ces « partenaires sociaux » d’avoir une attitude un peu irresponsable, mais à quoi bon faire une grande réunion si les décisions sont déjà prises et surtout déjà communiquées à la presse ?
Mais revenons à cette fameuse « TVA sociale ». Ce concept généreux n’est pas tout à fait neuf puisque l’on en attribue la paternité au sénateur Jean Arthuis, un centriste rallié depuis à François Bayrou, qui aurait fait cette proposition en 1998. L’idée est simple et, répétons le basée sur le plus élémentaire bon sens. Constatant que notre déficit commercial ne cesse de se dégrader c'est-à-dire que nous importons de plus en plus de produits et que nous en exportons de moins en moins ; constatant également que les pays à partir desquels nous importons le plus : Chine, Inde, pays de l’Europe de l’Est, Asie du Sud est, pratiquent des prix qu’il nous est impossible de concurrencer, il suffit de « taxer » les produits venant de ces pays. Une manière de rétablir un certain équilibre et, pour certains, de mettre dans le système une certaine morale. En effet ces pays, pour la plupart d’entre eux, ont des politiques salariales, sociales, environnementales beaucoup moins contraignantes que les nôtres. Certains feraient même travailler des enfants, ne respecteraient pas les normes européennes, se livreraient à la contrefaçon. Bref, puisqu’ils ne jouent pas le jeu, taxons-les !
Une fois que l’on a entendu tout cela se pose alors la question : comment taxer ces produits sans se livrer, au niveau national à un protectionnisme, « d’état » qui est extrêmement dangereux pour nos propres exportations. Car bien évidemment tous ces pays qui nous expédient des vêtements, des jouets ou d’autres produits manufacturés nous achètent aussi nos produits agricoles (champagne…) ou nos produits industriels (voitures, avions…). Là vient l’idée de la TVA dite sociale. On augmenterait la TVA sur un certain nombre de produits, dont la plupart sont des produits importés (les vêtements par exemple) et la recette correspondante serait affectée à la protection sociale en France (allocations familiales, sécurité sociale ou retraites par exemples). Ceci permettrait donc de baisser les cotisations payées par les entreprises pour financer, comme actuellement, cette même protection sociale. Diminuant le « coût du travail » pour les entreprises on rendrait nos produits plus compétitifs et l’on éviterait la tentation, pour les entreprises françaises, de délocaliser leurs fabrications à l’étranger.
Le raisonnement se tient. Tout cela semble assez évident. Mais cela fait plus de dix ans que ces concepts sont régulièrement remis sur la table sans qu’ils puissent déboucher sur la moindre application concrète.
Pourquoi donc cette inaction ? Le monde politique, tous bords confondus, reconnait unanimement que le « principe » et l’analyse sont bons. L’application pratique pose de multiples problèmes. Le Parti Socialiste est fondamentalement contre avec des arguments qui sont pour certains valables : augmenter la TVA c’est diminuer le pouvoir d’achat des Français et en particulier celui des plus faibles. Donc solution à exclure. Deuxième argument plus discutable celui là, cette affaire de TVA sociale est une « idée de droite » (diminuer les charges des entreprises !..) donc elle est mauvaise pour la gauche ( !) Rappelons-nous que Manuels Valls, durant un débat télévisé lors de la primaire du parti Socialiste, avait évoqué cette idée. Il s’était fait violemment recadrer par ces collègues sur le plateau !.. Ce qui, d’ailleurs, ne l’empêche pas aujourd’hui qu’il est porte parole du candidat Hollande, de trouver l’idée très mauvaise !..
A l’UMP également on est partagé sur la mise en œuvre de ce concept généreux. Nicolas Sarkozy a été le candidat du pouvoir d’achat aux dernières élections présidentielles. Il a échoué sur ce thème et, même si on peut lui trouver des circonstances atténuantes, beaucoup de parlementaires sont prêts à dire qu’il ne faut surtout pas en rajouter. A l’inverse la courbe de montée du chômage inquiète à juste titre. Il faut absolument trouver des solutions en URGENCE. Et beaucoup à l’UMP, sont toujours convaincus que l’une des solutions est la baisse du coût du travail donc la baisse des charges qui pèsent sur les entreprises.
Hier, 2 janvier, on entendait également une rumeur en provenance de l’UMP disant que cette affaire de « TVA sociale », dont la décision aurait été prise par Nicolas Sarkozy en personne, était un gage donné aux centristes, et à François Bayrou en particulier.
Mais en ce moment, les affaires vont très vite. Aujourd’hui, 3 janvier, l’intéressé, au cours d’une cérémonie de vœux à la presse diffusée sur BFM/TV, a répondu très précisément et très clairement à ces allégations. Tout d’abord, pour lui, la question fait débat également au Modem et ce débat n’est pas encore tranché !.. Ensuite, François Bayrou se dit personnellement défavorable à l’application de cette TVA sociale et il donne ses arguments que j’ai trouvé particulièrement intéressants (sans doute parce que je les partage ?)
1/ La compétitivité de nos entreprises, par rapport aux pays visés, n’est pas liée au coût du travail mais plutôt à notre capacité d’innovation, de recherche de la qualité, de service après vente,..
2/ Augmenter la TVA n’est possible que de 4 à 5 %. Au-delà c’est insupportable. 4 à 5 % qui vont baisser les charges des entreprises d’autant donc le coût du travail de 2 à 3 % en admettant encore que toutes les entreprises « jouent le jeu » de répercuter la baisse sur leur prix. Or avec les pays de l’Europe de l’Est-ce sont des écarts de 20 à 30 % que l’on constate. Avec la Chine ou l’Inde c’est plutôt de l’ordre de 60 à 100 % !..
3/ Augmenter la TVA c’est avoir la certitude d’entamer à nouveau le pouvoir d’achat des Français les plus modestes sans avoir aucune assurance que cela améliore la situation de nos entreprises.
Toutes ces explications suffisent à expliquer que TVA sociale pourrait être synonyme de fausse bonne idée. Si nos politiques, toutes tendances confondues n’ont jamais poussé plus avant dans cette direction c’est que peut-être les risques sont trop importants par rapport aux avantages présumés ?
Et puis Nicolas Sarkozy que l’on sait très habile dans ses confrontations politiques n’a-t-il pas lancé à nouveau cette idée pour forcer ses adversaires les plus dangereux à se positionner et à faire, eux aussi, des propositions ? Tout va très vite. On ne tardera pas à savoir ce qu’il en est exactement…
Jean Pierre Echavidre
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