
Très attendue, l'audition du général Rondot au procès Clearstream n'a pas déçu. A la barre, le militaire n'a pas renié le moindre des faits qu'il avait consignés dans ses notes. Un mauvais coup pour Dominique de Villepin.
"Je n'ai pas un QI de pétoncle!" Qu'on se le dise, faut pas prendre le général Rondot pour un jambon. Enfin appelé à la barre en ce début de troisième semaine du procès Clearstream, après que ses carnets ont été qualifiés par Dominique de Villepin de "salmigondis", le vieil espion, droit comme un i, est venu expliquer ce qu'il en est réellement de ses fameuses notes. Celui qui apparaît comme le scribe de cette affaire abracadabrantesque l'affirme, ce qu'il a écrit –son "journal de marche"- s'apparente à des verbatims. Autrement dit, le général a reproduit fidèlement ce qui a été dit devant lui, de façon absolument rigoureuse. Et la rigueur, ça le connaît.
Autant dire que les affirmations de l'ancien officier de renseignement aux prestigieux états de service n'arrangent pas Dominique de Villepin. Point par point, le militaire a en effet confirmé ses différentes dépositions. "Le nom de Nicolas Sarkozy a été cité par les uns et par les autres. Jean-Louis Gergorin a évoqué un compte couplé sur un certain Bocsa le liant à Nicolas Sarkozy", a-t-il affirmé en contradiction avec ce que prétendait l'ancien Premier ministre la semaine dernière. De même, Philippe Rondot a redit que Dominique de Villepin l'avait appelé pour lui demander d'intervenir en faveur d'Imad Lahoud lors d'une garde à vue de ce dernier. Enfin, le militaire a confirmé la phrase terrible qu'il avait consignée sortant de la bouche de Dominique de Villepin: "Si nous apparaissons, le président de la République et moi, nous sautons".
"Sûrement quelque chose"
Des déclarations qui sont évidemment du petit lait pour Thierry Herzog, l'avocat de Nicolas Sarkozy, notamment quand le général Rondot explique qu'une fois convaincu de la falsification, il a fait part de ses certitudes à Villepin, lequel se serait alors refusé à enterrer l'affaire. "Il y a quand même sûrement quelque chose, parce que ça s'agite", lui aurait répondu le principal prévenu du procès. Et pour appuyer un peu plus ses dires, l'ancien militaire a regretté que le ministère de la Défense, dont il dépendait, n'ait pas été prévenu de l'ordre qui lui avait été donné de poursuivre son enquête et de n'en référer qu'au Premier ministre et au chef de l'Etat, Jacques Chirac.
Seule concession de l'officier, il reconnaît, lui aussi, avoir été trompé par Imad Lahoud, dont il a pensé longtemps qu'il pourrait être une piste vers Oussama ben Laden. Trompé par Lahoud, il l'affirme. Manipulé par Dominique de Villepin, il le laisse entendre.
La défense de l'ancien Premier ministre a tenté de répliquer, en faisant apparaître que selon le témoin, rien ne permettait de dire que Dominique de Villepin savait que les listings étaient faux, avant juillet 2004, ce qui excluerait toute dénonciation calomnieuse de sa part. Me Gabriel Metzner, avocat de Villepin, a lu aussi cette autre note personnelle prise par le général Rondot le 3 mai 2004: "confirmation de la volonté de Nicolas Sarkozy de pulvériser Dominique de Villepin". Des propos que Rondot a attribué à Imad Lahoud. Ce dernier disait alors avoir rencontré Nicolas Sarkozy. Sur ses notes, le général a aussi noté au même moment: "contact Madhi (Lahoud)-Sarko. Retournement, effet boomerang". Bien vu.
Source : lejdd.fr 05-10-2009