Dans ces temps difficiles ou chacun se pose des questions sur son avenir ou sur l'avenir de ses enfants, d'autres n'ont même plus ce choix là; ils vivent au jour le jour, se débattent ,avec les difficultés et "improvisent" leur vie en fonction des circonstances. D'autres encore, aidés par la chance ou par leur travail ou bien parce qu'ils se trouvent encore dans le bon créneau, parviennent à maintenir leur pouvoir d'achat, souvent avec beaucoup de mal.
En choisissant des exemples représentatifs de notre société, le site "Eco89" a eu l'idée de passer "aux rayons X" les porte-monnaies de Français, que nous cotoyons tous les jours, sans bien savoir leurs problèmes

Jusqu'en 2003, Raymond était journaliste politique. Après petits boulots, chômage et formation, il est devenu gérant adjoint d'un supermarché du XXe arrondissement de Paris. Il a accepté de passer ses revenus aux rayons X.
Journaliste au Cameroun, Raymond a été arrêté et placé en garde à vue à plusieurs reprises pour des articles dénonçant « magouilles, tricheries et corruption » du régime. Il s'est finalement exilé en France, où il a obtenu le statut de réfugié politique. A son arrivée en France, il a vécu neuf mois à la Maison des journalistes.
« Mon objectif était de continuer à travailler dans la presse écrite mais vu la difficulté du métier en France, ça n'a pas été possible. Que faire en dehors de l'écriture alors que les lettres me passionnent depuis ma plus tendre enfance ? C'était la grande question. »
Après des boulots « pas motivants » et une longue période de chômage, Raymond a décidé de s'orienter vers le commerce et la vente, ce qui n'était pas chose facile : « Les conseillers de l'ANPE me disaient que mon profil n'était pas adapté. J'ai donc fait une formation d'un an à l'AFPA (Association nationale pour la formation professionnelle des adultes), comme manager de rayon. »
Cinq mois plus tard, en mars 2008, Raymond est embauché dans un supermarché. Rapidement, il passe du poste de responsable alimentaire à celui de gérant adjoint du magasin, chargé du management du personnel (huit employés) et de l'administration du magasin : « Dès que l'on doit rendre des rapports à la direction, je m'en charge car j'adore écrire. »
Il passe les commande, réceptionne les livraisons et doit rendre compte du chiffre d'affaires quotidien du magasin à la direction. « Et de façon subsidiaire, quand on manque de personnel, je range les rayons ou je tiens une caisse. »
Salaire : 1400 euros net par mois et 100 à 150 euros de prime
Pour 39 heures hebdomadaires, Raymond touche 1780 euros brut par mois. A cela s'ajoutent des primes (évolution du chiffre d'affaires, participation) auxquelles il avoue « ne pas comprendre grand chose » mais qui lui rapportent 100 à 150 euros par mois supplémentaires.
Si son avenir professionnel et personnel de Raymond est incertain, l'ancien reporter reste déterminé : « Je ne compte pas m'arrêter là. Je me donne à fond dans ce que je fais mais j'espère avoir d'autres opportunités. Je n'ai pas abandonné l'idée de retourner dans la presse ou de m'engager en politique. »
Dépenses : 1 320 euros par mois
Raymond vit dans un appartement de 49 mètres carrés à Bondy, en Seine-Saint-Denis, qu'il paye 600 euros, plus 110 euros de charges (EDF et GDF).
Son budget communication s'élève à 105 euros : 55 euros pour son forfait de téléphone portable, 30 euros pour Internet et son téléphone fixe et 20 euros de cartes téléphoniques pour appeler sa famille restée au Cameroun.
Son abonnement à Canal Plus et au satellite lui coûte 55 euros : « Je suis mordu de sport et mon travail m'occupe tellement que je ne trouve pas le temps d'en faire, alors je regarde les matchs à la télévision. »
Pour la nourriture, il dépense 150 euros par mois. Sa carte de transport lui revient à 35 euros, l'autre moitié étant prise en charge par l'entreprise. Son budget sortie s'élève à 90 euros par mois en moyenne : « Au Cameroun, je faisais tout le temps la fête, ici, ce n'est pas la même chose. »
Il envoie 100 euros par mois pour l'éducation de ses filles de 15 et 12 ans restées au Cameroun.
Raymond a dû faire un emprunt de 2500 euros chez Conforama pour acheter les meubles de son appartement. Il rembourse 70 euros par mois. « Il me reste 700 euros à payer pour en venir à bout. »
Epargne : 200 euros
A la fin du mois, il lui reste 200 euros qu'il place sur un compte épargne. Il confie, prudent, que quand il sera « plus stable », il aimerait « acheter une maison, si possible ». Et le Cameroun ?
« J'y retournerai si les choses évoluent dans le bon sens mais pour l'instant, je fais des démarches pour que mes filles viennent en France. S'il plaît à Dieu, elles arriveront dès la rentrée prochaine. »
Mais Raymond ne cache pas son inquiétude : « C'est sûr que je réduirai mes dépenses mais mon salaire n'est pas suffisant pour que je m'occupe seul de mes filles. »
Source : Eco89 04-2009