Le dossier de l’immigration agite depuis plusieurs semaines les grands partis politiques. Le parti présidentiel hésite à présenter son projet à l’Assemblée Nationale craignant de ne pas obtenir une majorité suffisante, le RN qui considère toujours que le sujet lui appartient ne cèdera pas un pouce sur ses revendications, la gauche reste en observation prête à faire l’obstruction, quant au Républicains ils ont pris tout le monde de cours en présentant leur propre projet. Pour ressouder le parti qui en a bien besoin depuis l’épisode des retraites, LR va déposer dès cette semaine deux propositions de loi « très offensives » sur l’immigration.
Le double objectif des Républicains est clair : réaffirmer l'unité du groupe et prendre ses distances avec une majorité présidentielle hésitante sur le sujet. C'est donc ensemble que les trois ténors de la droite - le numéro un du parti Eric Ciotti, le chef de file des députés LR Olivier Marleix, et le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau - ont levé le voile ce dimanche sur leurs deux propositions de loi sur l'immigration, vantant à l'unisson « un projet de rupture, à la fois audacieux et sérieux ».
Le premier texte est une proposition de loi constitutionnelle (PPLC), qui doit permettre de « modifier la Constitution afin de restaurer notre souveraineté en matière migratoire », explique Eric Ciotti dans un entretien croisé accordé au « Journal du dimanche ». La seconde est une proposition de loi (PPL) qui doit « mettre en œuvre les mesures puissantes » prévues par le parti, explique-t-il.
« Nous déposerons les textes ensemble cette semaine. Ensuite, nous pourrons les inscrire à l'ordre du jour, du Sénat notamment, à l'automne, pour ce qui est du texte ordinaire », précise Bruno Retailleau.
Inscrire l'assimilation dans la Constitution
Dans le détail, la PPLC vise à modifier plusieurs articles de la Constitution de façon à « réaffirmer le droit de la France à décider souverainement qui elle souhaite accueillir et qui elle souhaite refuser sur le territoire national ». L'article 1 serait ainsi modifié pour « affirmer le refus des communautarismes ». LR propose aussi d'inscrire l'assimilation dans la Constitution en complétant l'article 3 pour proclamer que « nul ne peut devenir Français s'il ne justifie de son assimilation à la communauté française ».
L'article 11 sera, lui, modifié pour « permettre la tenue d'un référendum sur la politique migratoire », quand, aujourd'hui, « le référendum ne peut porter que sur l'organisation des pouvoirs publics et des réformes économiques, sociales et environnementales », rappelle Bruno Retailleau.
Déroger au droit européen
LR compte par ailleurs inscrire dans la Constitution « la possibilité de déroger à la primauté des traités et du droit européen […] quand les intérêts fondamentaux de la nation sont en jeu », en considérant que l'immigration entre dans cette case, explique le chef des sénateurs LR. Sur ce dernier point, le parti de droite l'assure : « Ce texte n'est pas anti-européen. » « Le sujet, c'est moins les traités que l'interprétation qu'en font les juges. Quand le juge s'exonère de la loi, il faut qu'une loi organique permette d'intervenir », affirme Bruno Retailleau.
Menace de censure
La PPL proposée par LR doit justement, après modification de la Constitution, permettre l'application de plusieurs mesures contre « l'immigration de masse », expliquent les chefs du parti. Parmi elles, le vote, chaque année par le Parlement, d'une loi fixant le nombre d'étrangers admis en France pour chaque motif ; le remplacement de l'aide médicale d'Etat (AME) par une aide médicale « d'urgence » moins généreuse ; le rétablissement d'un « délit de séjour irrégulier » ou encore un durcissement des conditions d'octroi de la nationalité au titre du droit du sol.
« Nous changeons radicalement d'approche avec ces deux textes. Les Français attendent une reprise en main énergique de l'immigration », explique Olivier Marleix, qui renvoie la balle à Elisabeth Borne : « Le gouvernement nous dit qu'il veut un texte ? Eh bien, nous lui en proposons deux ! Pour nous, c'est ça ou rien. »
Le chef de file des députés LR prévient qu'il déposera une motion de censure contre le gouvernement si ce dernier tentait de faire passer par 49-3 « un texte laxiste ». « Chiche ! » lance quant à lui Eric Ciotti. « Allez-y. Saisissez cette opportunité. Toute autre décision serait de la procrastination et le choix de l'impuissance », assure-t-il.
Source : LesEchos.fr 21-05-2023
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