Coup de tonnerre dans le monde de l’Automobile ce lundi 19 novembre au matin. Nissan réunira ce jeudi 22 novembre prochain son conseil d'administration pour voter le départ de Carlos Ghosn. Le constructeur japonais affirme que l'emblématique patron a dissimulé une partie de ses revenus au fisc japonais. Le directeur général de Nissan, Hiroto Saikawa, a dénoncé « des pratiques financières inacceptables et graves » et a confirmé l'arrestation de Carlos Ghosn à Tokyo, annoncée par la chaîne de télévision publique japonaise NHK. Selon l'agence de presse japonaise Jiji, le président de Nissan aurait sous-évalué de cinq milliards de yens (38,9 millions d'euros) sa rémunération, qui s'élevait à près de 10 milliards. D'après l'agence de presse Kyodo, cette pratique a commencé en 2011 et a duré plus de cinq ans. Carlos Ghosn est actuellement entendu sur ce sujet par la justice japonaise.
Trop de pouvoir dans les mains d’une seule personne
Lundi matin, le quotidien Asahi Shimbun avait révélé cette audition. En France, L'Élysée a confirmé qu'une « procédure est en cours » au Japon, et le président Emmanuel Macron a déclaré qu'il était « trop tôt pour se prononcer sur la réalité des faits » et que « l'État sera extrêmement vigilant quant à la stabilité de l'alliance et au groupe Renault ».
Dans un communiqué, Nissan indique que « sur la base du rapport d'un lanceur d'alerte, Nissan a mené une investigation interne, depuis plusieurs mois, relative à des mauvaises pratiques impliquant Carlos Ghosn ». Le directeur général de Nissan a également ajouté qu'il « s'efforcera de faire en sorte que l'alliance avec Renault ne soit pas affectée », soulignant que « trop de pouvoir était concentré entre les mains d'une seule personne ».
Renault-Nissan devenu le N°1 mondial
En dix ans, celui qui est surnommé le "cost-killer" ("tueur de coûts") par ses concurrents a réformé en profondeur plusieurs marques automobiles et, misant sur la voiture électrique à bas prix, a propulsé l'alliance Renault-Nissan au quatrième rang mondial en 2014. Après l'affaire du "Dieselgate" qui a frappé Volkswagen, les difficultés financières de General Motors et les problèmes techniques rencontrés par Toyota - forcé de rappeler, en 2016, près de 3,4 millions de véhicules -, Renault-Nissan est devenu le numéro 1 mondial début 2018, avec 10,6 millions de véhicules vendues l'an dernier.
Patron omniprésent, Carlos Ghosn dirigeait, en 2016, pas moins de quatre groupes automobiles (Renault, Nissan, Mitsubishi Motors et AvtoVAZ, le constructeur russe notamment propriétaire de Lada). Le patron était le point commun de cet ensemble complexe, dans lequel chaque groupe détient une partie des actions d'un autre. Du fait de son âge, il avait déjà pris du champ en quittant le poste de PDG de Nissan en avril 2017 - tout en restant à la tête du conseil d'administration - et en cédant sa place à la tête d'AvtoVAZ.
Dix marques et 470 000 salariés
Du côté de Renault, personne n'était joignable pour commenter cette nouvelle. Il semble que la surprise soit totale du côté du constructeur français. L'information va forcément avoir des conséquences sur l'avenir de l'alliance entre Renault et Nissan, associés depuis plusieurs années avec succès.
À midi, lundi 19 novembre le titre Renault perdait près de 13% à la Bourse de Paris. À la tête du groupe au losange depuis 2005, Carlos Ghosn a conquis la confiance des actionnaires par la force des résultats obtenus tant au sein du constructeur français que de Nissan, son partenaire japonais. L'Alliance Renault-Nissan, élargie en 2016 à Mitsubishi, est devenue numéro un mondial des ventes l'an dernier avec 10,6 millions d'automobiles écoulées. Sous l'impulsion de Carlos Ghosn, le groupe aux finances désormais solides a été le premier à investir massivement dans la voiture électrique, dont il est leader mondial. Le géant industriel franco-japonais regroupe dix marques (dont Dacia, Lada, Samsung Motors, Alpine, Infiniti, Datsun...). Il compte 470.000 salariés et 122 usines sur tous les continents.
Un salaire qui a déchainé la chronique
Reconduit à la tête du groupe en juin dernier, avec le soutien de l'actuel gouvernement, Carlos Ghosn avait accepté de réduire de 30% de son salaire et de nommer un numéro deux, Thierry Bolloré, appelé à lui succéder. En tant que PDG de Nissan, il avait touché pour la période d'avril 2016 à mars 2017 quasiment 1,1 milliard de yens (8,8 millions d'euros au cours de l'époque). Il gagnait en outre plus de 7 millions d'euros par an au titre de PDG de Renault.
Des salaires qui, en leur temps, avaient donné lieu à de multiples polémiques…