Lorsqu’ils ont majoritairement voté pour le Brexit les Anglais étaient loin d’imaginer le nombre de problèmes complexes que cela allait poser à leur pays. Il faut dire aussi que ceux qui étaient les plus farouches partisans de la sortie de l’Europe se sont bien gardés d’expliquer que la chose allait être difficile !... Il est un point qui bloque toute avancée dans les négociations depuis bien des semaines et qui risque de ne pas se résoudre de si tôt : l’Irlande du Nord.
On se souvient de la terrible guerre civile qui a opposé, pendant des années, la République d’Irlande et l’Irlande du Nord qui fait partie du Royaume Uni. Les Accords de paix de Belfast qui ont mis fin à la guerre civile entre les deux pays sont très clairs : le traité du « Vendredi saint » signé en 1998 stipule qu'aucune frontière terrestre ne sera établie entre les deux pays. Toute la question aujourd’hui porte donc sur les 500 kilomètres de frontière, entre la République d'Irlande qui reste dans l'UE, et l'Irlande du Nord, qui fait partie du Royaume-Uni et qui doit donc quitter l'UE. L'un reste, l'autre part, mais aucune frontière matérielle n'existe pour les séparer.
Bruxelles qui voudrait bien sortir de cette impasse a présenté, mercredi 28 février dernier, un projet de traité qui traduit en langage juridique les multiples aspects du départ britannique, dont l’épineuse question de l'Irlande du Nord. Le texte présenté par le négociateur en chef de la Commission européenne, Michel Barnier, préconise un « alignement complet » entre l'Irlande du Nord et la République d'Irlande. Cela signifie que l'Irlande du Nord deviendrait « un espace réglementaire incluant l'Union Européenne et le Royaume-Uni », « sans frontières intérieures », et où la libre circulation des biens serait assurée. L’absence de frontière entre l’Irlande et l’Irlande du Nord impliquerait par conséquent une barrière douanière avec le reste du Royaume-Uni. « Jamais », répond la Première ministre britannique, Theresa May.
Le parti ultraconservateur nord-irlandais DUP dont dépend la majorité parlementaire de Theresa May, a jugé le projet de traité « constitutionnellement inacceptable ». La première ministre ne peut pas se permettre de perdre le soutien du DUP, car elle est déjà fragilisée au sein même de son parti. Une partie des parlementaires conservateurs ont été déçus par la manière dont les premières phases de négociations se sont déroulées. Un rapprochement est même imaginé avec le chef de l'opposition travailliste, Jeremy Corbyn. Le » 26 février dernier, il a tenu un discours qui défendait le maintien du Royaume Uni dans le marché unique, réglant le problème irlandais.
Pour éviter de se retrouver dans une situation compliquée, vis à vis de son parti, ou de l'Union Européenne, Theresa May évite pour l’instant de se prononcer clairement. Si elle perd le soutien de sa majorité au parlement, alors l'accord du Brexit, qui devrait être voté le 29 mars 2019, pourrait ne pas être ratifié, ce qui placerait Theresa May dans une mauvaise posture.
Du côté des diplomates européens, on estime que "la question irlandaise a encore le potentiel de faire échouer tout l’accord sur le Brexit". La deuxième de négociation doit être conclue avant octobre.