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30 mai 2017 2 30 /05 /mai /2017 07:00
ANGELA MERKEL : « NOUS, LES EUROPEENS, DEVONS PRENDRE EN MAIN NOTRE PROPRE DESTIN »

 

La Chancelière allemande n’a pas caché durant les deux jours du sommet du G7 en Sicile, sa désapprobation à propos de la manière dont se déroulaient les discussions.  Au lendemain du sommet du G7 de Taormine, la chancelière tire, avec beaucoup de lucidité, les conséquences du fossé qui sépare désormais les Etats-Unis de l’Europe.

 

« L’Allemagne ne peut aller bien que si l’Europe va bien »

En politique allemande, il ne faut jamais négliger l’importance de la dimension régionale. L’histoire retiendra que c’est sous une tente à bière à Munich, devant 2 500 militants de l’Union chrétienne-sociale (CSU), parti conservateur bavarois allié de l’Union chrétienne-démocrate allemande (CDU), que la chancelière Angela Merkel a prononcé l’une de ses déclarations de politique extérieure les plus remarquées et commentées dans la presse internationale.

« Les temps où nous pouvions totalement nous reposer sur d’autres sont en partie révolus. Je l’ai vécu ces derniers jours », a-t-elle lancé, dimanche 28 mai, au lendemain du délicat sommet du G7 à Taormine (Italie), miné par les désaccords avec Donald Trump : « Nous, les Européens, nous devons vraiment prendre en main notre propre destin. » Ces mots ont largement été compris comme une constatation pragmatique, presque amère, d’une situation nouvelle : Angela Merkel juge qu’il est désormais difficile de compter sur le traditionnel allié américain, ou sur le Royaume-Uni post-Brexit, dans la coopération internationale.

« Bien sûr, nous devons rester amis avec les Etats-Unis, le Royaume-Uni, en bons voisins, là où cela est possible, ainsi qu’avec la Russie. Mais nous devons le savoir : nous devons lutter nous-mêmes, en tant qu’Européens, pour notre avenir et notre destin », a insisté la chancelière, tout en souhaitant, sous les applaudissements, le succès d’Emmanuel Macron : « Là où l’Allemagne peut aider, elle aidera, parce que l’Allemagne ne peut aller bien que si l’Europe va bien », a-t-elle précisé.

 

La réunion du G7 a été jugée catastrophique par la délégation allemande.

Le sommet du G7 à Taormine, qui s’est achevé sans résultat tangible, a été jugé catastrophique par les membres de la délégation allemande. Sur le climat, Angela Merkel a même reconnu que les discussions s’étaient déroulées de façon « très insatisfaisante ».

« Ce que nous avons vécu lors du sommet ne correspond pas à ce que nous attendons d’un président américain, ni sur le plan intellectuel ni sur le plan du potentiel de l’Amérique », a déclaré, sans concession, Jürgen Hardt, député membre de la CDU et coordinateur du ministère des affaires étrangères pour les relations transatlantiques, qui juge que « le président américain a raté une grande occasion de faire valoir son pouvoir d’orientation dans le monde. »

Sur le climat et les réfugiés, les discussions n’ont abouti qu’à un constat de désaccord. A l’OTAN, le président américain a même sermonné ses alliés, sans confirmer, en dépit des engagements transatlantiques, que les Etats-Unis feraient preuve de solidarité en cas d’agression extérieure.

Pour conquérir Donald Trump, Angela Merkel n’avait pourtant pas ménagé ses efforts : outre son voyage à Washington, à la mi-mars, elle avait invité, fin avril, la fille du président des Etats-Unis Ivanka Trump à participer à ses côtés à une discussion à Berlin sur le rôle des femmes dans l’économie dans le cadre du G20, en présence notamment de la directrice générale du Fonds monétaire international, Christine Lagarde. Peine perdue. Durant le sommet, Donald Trump s’en est une fois de plus pris ouvertement aux excédents commerciaux allemands, jugés « mauvais, très mauvais » (« bad, very bad »).

 

L’alliance germano-américaine doit être revue

La déception affichée par Angela Merkel à l’issue du sommet de Taormine marque un moment délicat dans les relations germano-américaines. La droite allemande a toujours mis l’alliance avec les Etats-Unis au cœur de sa conception de la politique extérieure. En 2003, elle avait ainsi plaidé en vain, contre l’avis du chancelier Gerhard Schröder, pour le soutien de Berlin à l’intervention américaine et britannique en Irak, au nom de l’alliance avec Washington, et de leur « communauté de valeurs ».

Cette alliance s’appuie traditionnellement sur des événements historiques profondément marqués dans l’esprit des Allemands. L’ami américain est celui du plan Marshall, du pont aérien (1948-1949) ou de la défense des libertés incarnée, notamment, par le fameux discours de John Fitzgerald Kennedy à Berlin en 1963 (« Ich bin ein Berliner »). Cette Amérique-là semble désormais bien loin aux yeux d’Angela Merkel.

Les conséquences sont multiples. Sur le plan de la défense, la chancelière confirme ce qui est clair depuis plusieurs années : l’Union européenne – et notamment l’Allemagne – doit investir davantage pour sa défense et ne plus compter uniquement sur l’aide militaire américaine pour assurer sa sécurité. Plus grave, la coopération sur certains sujets ne va désormais plus nécessairement de soi : la « communauté de valeurs » est remise en cause ; jamais l’étendue des désaccords entre Berlin et Washington, sur le fond comme sur la forme, n’avait été à ce point présentée au grand jour.

 

Source : LeMonde.fr  29-05-2017

 

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/europe/article/2017/05/29/angela-merkel-nous-les-europeens-devons-prendre-en-main-notre-propre-destin_5135183_3214.html#3IxWLVgKemgWu99z.99

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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