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4 août 2017 5 04 /08 /août /2017 07:00
LES ACTEURS DE LA REVOLUTION : MIRABEAU (4)

 

 

 

SOUS L'EMPRISE DE L'AMI DES HOMMES :

1750 - 1765

 

 

 

 

 

    Malgré les handicaps physiques et moraux qu'il ne peut que constater chez son fils, le marquis se résout à essayer de faire de Gabriel-Honoré un homme digne de la race des Mirabeau. Très jeune il lui donne un précepteur et tente de lui faire inculquer les bons principes. Ceux qu'il a appris dans l'Emile de Jean-Jacques Rousseau, un auteur pour lequel il éprouve une grande admiration. Est-ce la méthode d'éducation, est-ce l'intelligence de l'élève, ou est-ce tout simplement les deux réunies qui font de Gabriel-Honoré un enfant qui étonne déjà son entourage alors qu'il n'a pas encore cinq ans. Son savoir est extrêmement étendu pour un enfant de cet âge, il comprend très vite et fait montre d'une mémoire prodigieuse.

    Par contre, si l'on en croit ce qu'en dit son père, cet enfant très doué pour les choses de l'esprit n'en est pas moins devenu menteur et hâbleur. Le marquis de Mirabeau exprime, à propos de ce jeune garçon qui n'est pas encore sorti de l'enfance, un jugement déjà bien pessimiste :

 

« Je dois renoncer à ce que cet individu ait jamais le caractère de notre race .. L'aîné de mes garçons (1) vendra son nom; il pourrait fort bien s'appeler un enfant mal-né; il ne me parait devoir être qu'un fol invinciblement maniaque.. Je vois maintenant le naturel de la bête et je ne crois pas qu’on n’en fasse jamais rien.. » (2)

 

    Le marquis ne peut pas faire autrement que de reconnaître la précocité et l’étendue du talent dont fait preuve son fils aîné. Il en est parfois lui-même étonné,  mais il préférerait se faire tuer sur place plutôt que de l'avouer ! Le père est d'une profonde inégalité dans tous ses jugements, surtout quand il s'agit de ce fils sur lequel il a fondé tant d'espoirs. Un jour il se montre extrêmement sévère, quelques jours plus tard il le couvre d'éloges. Le marquis est d'autant plus rigide et d'autant plus vigilant, à propos de l'évolution de son fils aîné, qu'il est lui-même en passe de devenir célèbre. Le rêve de sa vie est sur le point de se réaliser : l'ouvrage paru en 1750, sans nom d'auteur, « Des Assemblées Provinciales » a été salué par les économistes de Louis XV comme un ouvrage de référence. Encouragé par ce succès, le marquis de Mirabeau publie, l'année suivante, toujours sans signature, un autre ouvrage, assez confus celui-là, dans lequel on relève quelques maximes bien pensées malheureusement noyées, le plus souvent, dans un texte embrouillé. Le titre de l'ouvrage fera cependant fortune; à tel point qu'il va rapidement devenir le sobriquet de son auteur : « L'Ami des Hommes ».

 

    On a enfin remarqué le marquis de Mirabeau et ses talents d’écrivains sont reconnus ! Le Docteur Quesnay, médecin particulier de Madame de Pompadour, l'introduit dans la secte des économistes connue depuis sous le nom de physiocrates. On l'invite aux soupers du Docteur et il y rencontre des Dupont de Nemours, Diderot, d'Alembert, Helvétius, parfois même Turgot.

    Victor, marquis de Mirabeau, tient enfin la gloire à laquelle il aspire depuis tant d'années. Il côtoie les plus grands. Ceux que Madame de Pompadour vient parfois honorer de sa présence. Il est maintenant connu à la Cour. Son rêve s'est enfin réalisé et il proclame, à qui veut bien l'entendre, que jamais il n'en a douté !

 

    Mais le marquis de Mirabeau, l'Ami des Hommes comme on l'appelle maintenant, est tenu avant tout par le démon de l'écriture. Il publie donc un nouvel ouvrage : « Théorie de l'Impôt » dans lequel, en guise d'introduction, il glisse une adresse au roi :

 

«  Sire, votre puissance n'est que la réunion des volontés d'une multitude forte et active à la vôtre, d'où il suit que la disjonction des volontés est ce qui coupe le nerf à votre puissance. Voila le mal, voici d'où il provient. » (3)

 

    Le texte, à nouveau, est assez confus mais, malgré cela, le ton irrévérencieux n'échappera à personne, et surtout pas à l'entourage du roi. L'insolence des propos ne pouvait laisser Louis XV indifférent. La réplique du monarque ne se fait d'ailleurs pas attendre : une lettre de cachet, datée du 14 Décembre 1760, envoie l'Ami des Hommes dans un cachot du Donjon de Vincennes.

    Madame de Pompadour intercédera très vite en faveur du marquis, si bien que l'emprisonnement sera de courte durée : à peine huit jours. Le marquis de Mirabeau sera alors libéré puis placé en résidence surveillée dans son château du Bignon. Et cet exil forcé va finalement lui être bénéfique; il va trouver là un peu de paix. Son épouse, qui a ressenti quelques problèmes de santé, est partie se faire soigner chez sa mère et l'Ami des Hommes en éprouve un énorme soulagement. Il va trouver la vie sans elle tellement plus agréable qu'il passera le reste de son existence à l'empêcher de reprendre sa place auprès de lui sous le toit conjugal.

 

    La haine qu'il voue à cette femme depuis de nombreuses années le conduit à reporter encore davantage sa rancœur sur son fils aîné qui a tellement de points communs avec sa mère. L'énorme correspondance qu'il échange avec son frère le Bailli est emplie de phrases terribles à l'encontre de ce fils qui n'est âgé que d'une douzaine d'années.

 

« C'est un type profondément inouï de bassesse, flatitude absolue et la qualité de la chenille raboteuse et crottée qui ne déchenillera pas.. » (4)

 

    Dans une lettre adressée au même Bailli, quelques mois plus tard, le marquis écrit ce jugement qu'il porte sur son fils. Les mots sont si durs que l'on a peine à comprendre un mépris poussé à cette extrémité :

 

« Il y a des excréments dans toutes les races.. » (5)

 

 

 

 

 

 

1 - On a vu qu'un autre garçon, Boniface, est né en 1754. On lui donnera le sobriquet de Mirabeau-Tonneau et il sera amené à jouer un petit rôle aux côtés de son frère au cours des premières années de la révolution.

 

2 - Cité par Duc de CASTRIES  "Mirabeau"  op. cit. page 43

 

3 - idem page 50

 

4 - Lettre du marquis de Mirabeau au Bailli du 3 Décembre 1761

 

5 -  Lettre du marquis de Mirabeau au Bailli du 18 Mars 1762

 

 

 

ILLUSTRATION : Gabriel Honoré comte de Mirabeau

 

 

 

 

 

A SUIVRE

 

LES ACTEURS DE LA REVOLUTION : MIRABEAU (5)

LA PENSION DE L'ABBE CHOQUARD : 1765 - 1767

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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